Suite du prologue de Zay' ( Si vous ne l'avez pas lu, direction ===> Ici ! )

Zayev s'était installé près d'un petit lac en partie gelé. Un endroit calme et reposant où il régnait une atmosphère sereine. Quelques animaux s'y arrêtaient pour boire, biches comme ours. Le soleil se cachait progressivement derrière les montagnes, et un doux voile orange couvrait désormais le paysage blanc. Après une journée de marche pour fuir Brume, le lycan s'était octroyé un petit moment de repos. Traversant majoritairement les forêts, évitant les plaines et les routes, il n'avait ainsi croisé qu'une poignée de personne, dont un vieil estropié qui guettait à l'orée d'un bois et une poignée de gardes en patrouille sur les chemins. Pas d'alerte, pas de cris. Tant mieux. Moins de personne était au courant de sa présence, mieux il se porterait.

Un gargouillis vint cependant ramener Zayev à la réalité. A très juste titre, il avait une faim de loup. Il s'attela à trouver de quoi se nourrir, et fût vite récompensé après avoir chassé un cerf qui s'abreuvait non loin d'ici. La nourriture n'était plus vraiment un problème depuis ....la transformation. La préparation non plus. L’admettre l’écœurait au plus haut point, mais la viande crue avait bien meilleur goût qu'avant. Néanmoins, n'ayant jamais eut l'occasion de manger quelque chose de chaud depuis son accident, l'idée de cuire les morceaux saignants lui traversa l'esprit, ne serait-ce que pour goûter. Il savait qu'un feu en forêt trahirait facilement sa position. Mais après tout, qui pouvait le chercher, ici ? Après avoir tendu l'oreille et regardé aux alentours, rassuré, il partit chercher quelques morceaux d'écorces sèches et du petit bois.


La nuit noire avait pendant ce temps remplacée l'ambiance chaleureuse du crépuscule. Le chasseur s'était adossé le long d'un arbre, et avait réussi non sans mal à allumer un feu de camp. La douce chaleur qui en émanait lui manquait. Et de voir ces flammes danser au gré du vent frais, surpassait toutes les distractions. Enfin, il n'était plus vraiment difficile depuis le camp de bandit.

Étrange. La viande grillée n'était plus aussi appétissante qu'avant....


C'est alors que le silence se fit pesant. Zayev ne l'avait pas remarqué, mais seul le crépitement du feu brisait l'absence de bruit dans la forêt. Le crépitement, et un sifflement.

Un carreau vint se planter dans le tronc d'arbre derrière le lycan, frôlant son œil de quelques centimètres. L'adrénaline lui permit de se relever d'un coup, mais un deuxième sifflement meurtrier parvint à ses oreilles. Le second carreau traversa l'avant-bras gauche du loup-garou et se ficha dans l'écorce. La blessure fumait, et une douleur assommante le renseignèrent immédiatement sur le métal utilisé pour la pointe du projectile. De l'argent.

Un homme sortit des fourrés et marcha d'un pas déterminé vers Zayev, en l'accablant d'un regard remplit de haine. Dégainant une épée courte argenté, il chargea enfin vers le monstre en criant :

- Pour Zayev ! Meurs, abomination !

Cette voix. Cette tunique. Cette épée. Aucun doute.

- Idraan ? Idraan, arrêtes ! C'est moi, ton frère ! Zayev ! hurla le lycanthrope.

L'homme ne paru guère étonné, comme si cette éventualité lui avait déjà traversé l'esprit. Il continua sa charge, plus enragé que jamais.

- Je n'ai plus de frère !

........

Une brève étincelle naquit du choc des deux lames d'argent, accompagnée d'un son éclatant. Les deux personnages étaient l'un en face de l'autre, chacun bloquant l'arme de l'autre.

- Je te traque depuis le village de Brume, tu sais ? Dit-il en reculant.
Les vieux mendiants sont parfois les meilleurs informateurs...

Zayev n'avait pas besoin de demander le pourquoi du comment. Il savait parfaitement pourquoi son jeune frère se trouvait devant lui. Devenu ce que sa famille chassait, la déduction était toute faite...

- Alors Père a décidé d'envoyer un enfant pour s'occuper de moi ? Mignon. Je vois qu'il a toujours tendance à me sous-estimer.

La remarque agaça l'humain. Bien que physiquement changé, Idraan reconnaissait bien là le comportement de son grand frère. Un sentiment de pitié l'envahit un instant, pendant qu'il dévisageait la bête prise au piège. Il n'en garda pas moins ses précautions, se plaçant hors de portée de l'allonge du monstre. Le loup-garou était maintenant en bien mauvaise posture.

- Me sous-estimer... Très mauvaise idée.

Zayev tira violemment sur son bras entravé, se débarrassant du carreau en échange d'une douleur extrême et d'une prochaine cicatrice. Ainsi dégagé, il fonça vers Idraan qui n'avait pas prévu que son frère irait jusque là. S'ensuivit une série de parades et d'esquives des deux frères, trahissant un entraînement martial commun. Quand l'un prenait l'offensive, l'autre déviait et parait avec une efficacité redoutable. Ces enchaînements n'excellaient pas en rapidité, mais étaient d'une fluidité hors norme. Comme si chacun lisait dans les pensées de l'autre et en devinait le prochain coup.

Le combat semblait d'ailleurs s'éterniser, aucun n'avait l'avantage sur l'autre. Ils le savaient tous deux. Le lycan profita d'un contre réussi pour envoyer d'un coup de patte des braises du feu de camp dans le visage de son adversaire. Il saisit le bref moment ou Idraan baissa sa garde pour éviter les cendres ardentes et bondit sur lui. L'avantage était au loup. Il griffait et arrachait avec hargne tout ce qui passait sous ses griffes. Tissu, étoffe, cuir, plaques, peau, chaire. Le nordique ne pouvait plus répliquer. Il reculait encore et encore sous les coups de Zayev qui ne semblait pas se retenir. De multiples entailles étaient visible sous des lambeaux d'armure au niveau de ses avants-bras et de son torse. Enfin, la bête projeta son frère ventre au sol et vint poser une patte sur son dos, l'empêchant de se relever.

- Je sais que tu ne me croiras pas, mais je ne supporte pas ce que je m'apprête à faire. Néanmoins, je ne vois que ça pour me permettre de fuir sans devoir te tuer.

Le lycanthrope attrapa les deux bras de son frère et commença à tirer, de plus en plus fort, tout en plaquant son corps au sol avec sa patte.

- Mais ? Qu'est-ce que tu fais ? ARRETES ! Je t'en pris ! Ne.....

- Rends-moi un service, petit frère. Rapportes à Père que j'essaie de trouver un remède.

Deux craquements résonnèrent dans toute la forêt, autrefois silencieuse, suivit d'un hurlement presque inhumain.

Pendant que Zayev échappait la scène, des cris de douleurs et d'injures l'accompagnait. Au loin, des lueurs tremblotantes approchaient. Des torches. Sûrement des villageois qui avaient entendu l'appel à l'aide d'Idraan. Il s'en sortirait certainement. Deux épaules déboîtées, c'est rarement fatal. Enfin, c'est ce que se répétait le lycan, comme pour se justifier.