Le désert ce jour-là était agité. Les dunes balayées par un vent violent et la terre toujours aussi tannée par le grand soleil dressé dans le ciel. Le masque de Salmon le protégeait de ces sables et poussières dans les airs. C'était d'ailleurs l'un des atouts de ce masque, et Saphar, lui, toujours aussi fidèle à son maître l'aidait à tenir un bon équilibre sur le sable et de monter ces grosses collines qui logeaient le long de la route qu'il avait empruntée. Enfin, route n'était pas vraiment le mot, mais Salmon étant si familiarisé avec le Noara interprétait cela comme des chemins.

La destination du fantôme était le temple des Sabliers. Ce fameux Temple qu'il explora il y a de cela un an avec un chercheur, Orin Alrod, aussi architecte et visiteur du désert. Mais aujourd'hui Salmon retourne en ces lieux avec un livre Sablique qui traite les nombreux symboles et runes qu'il ne pouvait décrypter à l'époque. Le livre a été acheté chez un vieux marchand nommé Zobek. Particulièrement surprit par l'ouvrage il n'hésita pas plus d'une plume de Seraf à le prendre.


Lors de son arrivée le temple était tel qu'il était il y a de cela un an. Toujours doté de cette belle architecture Sablique et de ces symboles gravés sur les murs. L'enceinte du temple est enfouit sous le sable, certainement engloutit dans les dunes avec le temps. Salmon descendit la dernière colline et se rendit devant le temple, s'arrêtant pour quelques minutes de pause. Avant de mettre les pieds dans le temple il lança un regard particulier aux alentours comme il le faisait à chaque fois avant d'y entrer.

« Sinome Maruvan Saphar ».

Deux mois. C'était le temps qu'il avait fallu au Nocturne pour traverser les terres des hommes accompagné de quelques comparses. A son entrée dans le Noara, il avait fait cavalier seul, littéralement Il avait pris l'apparence d'un noble en voyage. Il avait brièvement séjourné à Saâbre, le temps de trouver un guide fiable pour l'emmener au temple. Ses talismans avaient protégé Ahiyyad du Soleil, même s'il prenait bien garde à ne pas s'exposer plus que nécessaire. Arrivés en vue du temple, le guide avait retourné sa veste et menacé son client. Trois de ses comparses avaient surgi a ses côtés, cimeterres et dagues au poing. Pas d'archer. Quelques instants plus tard, ils étaient a terre, gémissants de douleur. Le nocturne ne prit pas la peine de les achever, dans cet état en plein coeur du désert, ils étaient déjà morts.
Il poursuivit sa route difficilement, sous les rayons ardents.
Le temple grandissait au fur et à mesure qu'il avançait. Impressionnante bâtisse, en partie recouverte de sable. Il renfermait sûrement bien des secrets.

Il aperçut une fine silhouette se diriger vers le temple, puis y pénètrer. Il n'avait pu voir distinctement a cause de la réverbération, mais il était certain qu'il s'agissait de son homme. Salmon Al-Jabâr. Un mythe, dans la région. Lorsqu'on l'évoquait, certains riaient, et d'autres...d'autres taisaient leur crainte.

Dans l'immédiat, camper au-dehors du temple n'aurait pas grand intérêt. Il était persuadé que s'il voulait en savoir plus sur cet individu, il devrait s'approcher. Il espérait simplement ne pas se brûler les ailes à l'instar des papillons que la flamme attire.

Il entra a son tour dans le temple, et se défit de sa cape usée afin d'être libre de ses mouvements. Pénombre. Silence. A nous deux pensa t-il avant de s'enfoncer dans les ombres du temple, tous les sens en éveil.

Les portes du temple se refermèrent sur elles mêmes.

Après une longue année le fameux temple avait gardé cette même ambiance sublime que Salmon admirait particulièrement. De magnifiques symboles logeaient le long des murs du Temple et la plus grande partie d'entre eux retraçaient la longue et belle histoire des Sabliers, civilisation aujourd’hui éteinte et disparue. Salmon fût toujours admiré par cette race qu'il jugeait sage, malgré les tyrannies et erreurs qu'elle aurait pu commettre. Mais comme il le dit souvent, chaque peuple a un jour commit des injustices. Peut-être même lui, qui sait.

Après quelques minutes de marches il tomba enfin sur ce monolithe en or. Deux autels étaient situés vers la gauche et la droite du monument et une dizaine de torches autour du lieu où les Sabliers effectuaient des invocations d'esprits. Juste devant, gravé sur un grand mur presque fissuré était inscrit « Neloê », ou autrement dit Feu dans la langue Sablique. Les Sabliers étaient d'après les légendes une race façonnée par le feu, essence d'Irmo, ils furent pendant longtemps les grands maîtres du Noara après la disparition des Djinns et du royaume Izalith dans le désert.

Pendant qu'il était plongé dans ses vastes pensées, d'un mouvement fin et bref il se retourna et annonça d'un ton fort.

« N'est-ce pas merveilleux, Ahiyyad Al-Fahd ? Et dire que des Sabliers priaient ici dans l'espérance d'avoir une bénédiction de leur Dieu autrefois. »

Après avoir sortit les grandes paroles, il reprit avec un ton beaucoup moins fort.

« Oui, moi aussi je possède des informateurs au sein du royaume Serkheim. »

Ahiyyad avait inspiré à pleins poumons lorsque les portes s'étaient refermées derrière-lui. Il régnait ici une étrange odeur d'ancienneté. Il avait écouté, et perçut les pas d'Al-Jabâr sur les pierres poussiéreuses du temple. Il s'était alors mis en marche, plus silencieusement que jamais. Les murs étaient couverts de signes d'une rare complexité, mais il ne leur prêta aucune attention. Il n'y avait à sa connaissance qu'une seule entité dans ce temple capable de lui nuire et il s'agissait de cet homme masqué. Il ne savait pas combien de temps il pourrait rester dissimulé dans les ombres, et appréhendait légèrement un face-à-face inévitable.

Il le suivit ainsi jusqu'a ce que l'homme s'avance à la lumière d'un cercle de torches. Il s'était approché du monolithe central avant de se retourner et de lancer :

« N'est-ce pas merveilleux, Ahiyyad Al-Fahd ? Et dire que des Sabliers priaient ici dans l'espérance d'avoir une bénédiction de leur Dieu autrefois. »

Le vampire se figea. Il avait pourtant été plus que silencieux. Comment ce diable d'homme...

« Oui, moi aussi je possède des informateurs au sein du royaume Serkheim. »

Ahiyyad grimaça. Les choses ne se déroulaient pas comme prévu. Il fallait rattraper le coup. Faire face. Au besoin, se battre, cet individu était plus que dangereux. Tant qu'il se rapprochait suffisamment, il avait ses chances.

Il s'avança d'un pas pour s'exposer à la lueur des torches.

Puis il invoqua le nom de la Nuit sur les flammes, et leur lumière mourut, étouffée par les ombres du nocturne. Le monolithe, les autels et Al-Jabâr étaient désormais plongés dans le noir.

"Si vous êtes si bien informé, peut-être est-ce inutile que je vous communique la raison de ma venue ?" riposta le vampire, tendu.

Les ténèbres s’abattirent sur Salmon et la pièce où les deux individus se trouvaient, confrontés ou presque. Dâmo forgea les démons à son image, et bien que nombreux sont ceux qui l'ignorent les Vampires sont eux aussi des Démons. Une branche démoniaque de la grande racine qui s'étend dans les fins fonds des âges depuis l'arrivée des Djinns et des Nomoriens. Salmon resta perplexe, écoutant le moindre son ou bruit qui pourrait atteindre son ouïe. Mais en vain, le néant régnait dans cette salle. Il n'avait donc pas affaire à un nouveau-né. Et cette magie...

Un sort de la magie noire ?

Salmon resta figé pendant un bref instant. Il leva alors Saphar - bâton qu'il porte avec lui - et une lumière bleuâtre en ressortit. Saphar éclairait Salmon et une petite partie du monolithe derrière lui sur lequel quelques symboles étaient percevables. Le Vampire pouvait surgir de nulle part et le fantôme du désert en était bien conscient. Avec le passage dans les terres obscures du Serkheim il eut le temps de se confronté à plusieurs d'entre eux dont un était un haut gradé de la fameuse garde noire. Salmon toujours attentif au moindre bruit qui pouvait se faire entendre autour attendait.

"Si vous êtes si bien informé, peut-être est-ce inutile que je vous communique la raison de ma venue ?"

« Non ça ne l'est pas. Et malheureusement j'ignore encore beaucoup de choses. Comme vous, apparemment. »

Après quelques secondes de pause il reprit la parole.

« Ce que vous ignorez actuellement c'est que vous êtes tombé dans un vulgaire piège. Je suis le seul dans cette salle qui est capable d'ouvrir et de refermer ces portes, et si par un de ces malheureux hasards je venais à rendre mon dernier souffle vous serez resté ici, emprisonné à jamais, vous tourmentant et disparaissant petit à petit en poussière. Ce n'est pas si mal que ça en fin de compte, rejoindre les décombres de ce temple devrait être un honneur. »

Le Vampire se déplaçait librement à présent. Il tournait autour de l'homme masqué en silence, dans son élément. Il prenait bien soin de rester aussi invisible qu'inaudible. Al-Jabâr venait d'user de son étrange bâton, à coup sûr ensorcelé. Il avait réussi. La cible était sur la défensive.

« Non ça ne l'est pas. Et malheureusement j'ignore encore beaucoup de choses. Comme vous, apparemment. »


Hm ! Un causeur. Il devait bien aimer donner des sermons, avec cette voix sèche et rocailleuse. Chaude également. Du genre à inspirer confiance.
Un homme au visage aquilin harangue une foule. Des cris, du feu. Quelqu'un est précipité dans les flammes. Le vampire repousse ces semblants de souvenirs dans les tréfonds de sa conscience.

Il ne réponds pas à l'homme du désert. Le silence était à l'heure présente sa meilleure arme.

« Ce que vous ignorez actuellement c'est que vous êtes tombé dans un vulgaire piège. Je suis le seul dans cette salle qui est capable d'ouvrir et de refermer ces portes, et si par un de ces malheureux hasards je venais à rendre mon dernier souffle vous serez resté ici, emprisonné à jamais, vous tourmentant et disparaissant petit à petit en poussière. Ce n'est pas si mal que ça en fin de compte, rejoindre les décombres de ce temple devrait être un honneur. »

Le Nocturne s'arrête un instant, brièvement déstabilisé. Il reprit rapidement ses esprits. Cet homme n'était décidément pas ordinaire, mais il ignorait en effet les tenants de sa mission. Il n'était pas venu ici pour le supprimer. Le vampire jaugea le pour et le contre. Le lui annoncer, où laisser le fameux fantôme mariner encore un peu ?


Les noirceurs se resserraient autour de l'homme au masque. Par moment, quelque chose semblait s'agiter a la lisière, mais rien ne se précisait. Le vampire jouait avec sa magie.

Puis le vampire écarta les ombres et apparut au regard de Salmon, a quelques pas seulement de lui. Son visage cependant, n'était que partiellement éclairé par Saphar, déformant son expression neutre pour lui en donner une sinistre.

-Paix, maître Al-Jabâr. Je connais votre nom comme vous connaissez le mien. Je n'ai rien à gagner en vous tuant, et j'imagine que nous pouvons aisément parvenir à un accord. Qu'en dites-vous ? sourit le vampire.

« Paix, maître Al-Jabâr. Je connais votre nom comme vous connaissez le mien. Je n'ai rien à gagner en vous tuant, et j'imagine que nous pouvons aisément parvenir à un accord. Qu'en dites-vous ? sourit le vampire »

Ce visage noyé dans l'obscurité inspirait la solitude, l'ignorance et la mélancolie. La magie noire qui entourait les torches disparue, et ce par la simple volonté du Vampire. Sort ? Non, c'était un tout autre domaine et Salmon fût particulièrement intrigué par cela. Lorsque les ombres disparurent la lumière écarlate de Saphar s'éteint elle aussi, lentement.

« C'est une sage décision Ahiyyad Al-Fahd, inutile de propager le sang dans un endroit aussi sacré et important que celui-ci ! »

Salmon se retourna et commença à marcher vers une porte, certainement celle qui donnait accès au vrai temple du domaine. Enfouit sous le sable, là était transcrit toute l'histoire des Sabliers. Lorsque il ouvrit la porte et qu'il était sur le point de pénétrer dans l'antre il s'arrêta pendant un instant et se retourna vers le Vampire.

L'homme l'observa un instant, semblant indécis. Puis il hocha imperceptiblement la tête alors que la lumière finissait de revenir.

« C'est une sage décision Ahiyyad Al-Fahd, inutile de propager le sang dans un endroit aussi sacré et important que celui-ci ! »

Gagné.
Il se retourna, offrant son dos au vampire, qui fut tenté un instant de l''assommer sur place. Ce serait plus simple ainsi, certainement...Mais le laisser libre de ses mouvements le tentait. Il serait plus enclin à répondre aux questions du vampire... Oui, il prendrait ce risque.
Il en avait pris d'autres, et toujours cela avait payé.
Ainsi, le nocturne suivit l'homme de son pas silencieux.

Il se retourna avant d'aller plus loin dans les entrailles du temple et lâcha :

« Al-Jabâr n'est pas mon nom ».

Combien de surprises avait-il encore dans son sac ? Le vampire rendit son regard au fameux fantôme sans sourciller. Il doutait d'apprendre aujourd'hui le nom véritable de cet énergumène, mais il s'efforcerait de le découvrir un jour. Son instinct lui disait que le nom lui donnerait un certain pouvoir sur l'individu.
Mais il allait falloir jouer au plus fin.

-Que faisons-nous ici maître Al-Jabâr, ou quel que soit le nom que vous vous donnez ? Ces vieilles pierres...Que cachent-elles ?

Que caches-tu ?

Que faisons-nous ici maître Al-Jabâr, ou quel que soit le nom que vous vous donnez ? Ces vieilles pierres...Que cachent-elles ?

Le Vampire semblait être intéressé par ce qui l'entourait. Cela rassurait Salmon dans un certain sens. Peut-être restait t-il encore de la lumière dans son âme, se répéta t-il. La question du Vampire bloqua son avancement vers la porte qui donnait au sanctuaire du temple, il s'arrêta et pris le temps de se retourner, encore une fois, fixant le Vampire pendant quelques instants. Après maintes observations une nouvelle question vint à l'esprit labyrinthique de Salmon ; était t-il en train de jouer la comédie ? Son regard reflétait le mensonge comme la vérité, une fusion des deux éléments.

« Les Sabliers, en avez-vous déjà entendu parler ? Cette fameuse civilisation qui est apparue au troisième âge juste après la disparition des Djinns et du royaume Izalith »

Il lança un regard aux alentours et repris la parole, « Nous nous trouvons dans le dernier temple qui leur appartenait autrefois. Ou du moins, le dernier d'entre ceux que nous connaissons. Bon nombre d'entre eux furent engloutis dans les Dunes ».

Pendant qu'il parlait il franchit la porte qui donnait accès à un long couloir et se retourna une fois de plus vers le Nocturne. « Malheureusement pour vous, vous ne pourrez pas mettre les pieds ici ». Son masque et la moitié de son corps étaient alors cachés par la noirceur qui se trouvait juste derrière lui. Il ne tarda pas à faire jaillir la lumière bleuâtre de Saphar qui éclaira une partie du couloir : les escaliers qui y menaient et les deux murs où étaient inscrits des écrits dans la langue Sabliques.

« Je reviendrai ».

Il laissa percer pour une dernière fois son masque, toujours aussi terrifiant et dérangeant, avant que les portes ne se referment sur elles mêmes.

« Les Sabliers, en avez-vous déjà entendu parler ? Cette fameuse civilisation qui est apparue au troisième âge juste après la disparition des Djinns et du royaume Izalith »

Les Sabliers. Il se remémora d'anciens jours. Après une dure journée à courir, frapper, et se faire frapper. Son ami, celui qui contait les histoires...Hemri ? Il ne s'en souvenait plus bien. Il lui en avait parlé.

Il étaient là au temps des dragons et des grands changements. Ils aimaient le feu et étaient aimés de lui. Les Sabliers.

Ce Salmon n'était donc pas totalement fou. Cela rassura en partie Ahiyyad.


« Nous nous trouvons dans le dernier temple qui leur appartenait autrefois. Ou du moins, le dernier d'entre ceux que nous connaissons. Bon nombre d'entre eux furent engloutis dans les Dunes ».

Continues. Tu vois bien que les vieilles pierres sont d'un grand attrait pour moi.

Puis, il franchit un seuil et se tourna vers le vampire qui, instinctivement, n'avança pas.

« Malheureusement pour vous, vous ne pourrez pas mettre les pieds ici »


Avait-il bien entendu ? Il allait le laisser là ? Il délirait !

« Je reviendrai ».

Oui, pour te jeter dans mes bras sans doute !

Le prenait-il pour un imbécile ? Hélas, des portes de pierre s'étaient refermées définitivement sur l'homme masqué dans un bruit sourd. Le vampire se retint de hurler de frustration et frappa violemment le mur qui lui faisait face. Un nuage de poussière en résultat et il dû s'éloigner. Il respira à fond et se résigna. Cet homme était pour l'instant sa seule porte de sortie. Il allait attendre quelques temps, puis chercherait à s'en sortir seul si Al-Jabâr ne montrait pas signe de vie.

Il passa près des torches et les éteignit l'une après l'autre. Il voulait être dans l'obscurité pour attendre. Il regagnerait une certaine stabilité.

Le nocturne s'assit et ferma les yeux. Le silence se fit dans le temple, soudain plongé dans un noir d'encre.

Au cœur des ombres, un murmure s'élève et tournoie, semblant sculpter à même la pénombre.

Merveille, merveille, se répétait Salmon en parcourant le couloir tel un luciole en quête de lumière, éclairé par Saphar d'une lumière bleuâtre rappelant l'océan Olorin lorsque l'aube s'y abattait. Les études sur la langue Sablique qu'il effectua dans la bibliothèque rouge du palais royal lui permettaient de comprendre les écrits gravés sur les deux murs, dressés vers la gauche et la droite. Ils disaient...

Nous avons vus l'inimaginable, nous avons dépassé l'impossible.
Les légendes racontent que les Sabliers étaient des magiciens particulièrement puissants, capables des pires choses comme des plus belles. L'histoire officielle de leur disparition soudaine et presque inexpliquée est celle où ils furent abattus par une armée de Djinns de retour sur le Noara afin de reprendre les terres qu'ils leurs appartenaient autrefois, eux qui disparurent durant le troisième âge avec leur légendaire royaume Izalith. Vérité, mensonge, Salmon est le genre d'individu qui préfère vérifier les choses avant de croire. Croire ? Cela n'existe pas en réalité, l'univers tel qu'il l'est ne croit pas. Ou du moins c'est ce que pense le fantôme du désert. Nos notions sont insignifiantes, nos sentiments et nos croyances n'existent pas. Si, seulement dans notre cadre à nous ; le cadre nommée vie, essence d'Irmo et de Dâmo. Pendant que l'esprit labyrinthique de Salmon était concentré sur toutes ces pensées lointaines et folles il tomba tout à coup sur le bout du couloir, qui en réalité était une porte.

Salmon posa sa main sur le mur, néant. Il essaya de pousser, néant. Déterminé à passer derrière cette porte il tourna un des cailloux du mur et un étrange mécanisme le fit ouvrir en deux ; du feu en ressortaient, un feu qui ne lui infligeait aucun dégât. Deux, trois pas, encore une merveille. Il se tenait là, le fameux monolithe qu'il cherchait. Il s'arrêta et déposa Saphar qui en même temps éteignait sa lumière. La salle était gigantesque et balayée par un étrange brouillard grisâtre, c'était le sixième et grand sanctuaire Sablique.


Salmon s’assit au sol, devant ce grand monolithe, attentif et réfléchit à la fois il attendait quelque chose. Le monolithe était gravé de symboles rejetant une lumière bleuâtre presque semblable à celle de Saphar. Cinq, dix, vingt minutes passèrent jusqu'à ce que les écrits du monolithes commencent à briller, la lumière étant cette fois-ci beaucoup plus claire jusqu'à être aveuglante. Salmon redressa la tête qui était jusqu'alors baissée et fixa le monolithe.

- Eolwê
Fit la voix qui résonnait comme si plusieurs personnes, femmes et hommes inclus, parlaient en même temps.

- Cela fait bien longtemps qu'on ne m'appelle plus de ce nom.

- Où sont...les autres ?

- Je l'ignore et hélas il nous reste encore trop peu de temps.

- J'attendrai ton retour...

- Retrouves les autres monolithes...

Les lumières disparurent et la voix avec, Salmon se releva et se retourna en avançant vers le couloir qu'il emprunta pour venir jusqu'ici. Une fois avoir traversé le mur brisé il parcouru encore une fois le long couloir en utilisant la lumière de Saphar jusqu'à arriver devant les portes derrière lesquelles se trouvait le Nocturne. Il lui restait encore cinq monolithes à retrouvés, cinq monuments dans les quatre coins du monde: comment va t-il y parvenir ? Il l'ignore lui même, un long et rude voyage l'attend derrière ces murs.

Il rouvrit les portes, le Vampire se tenait là, assit dans le noir.

Le vampire cligna des yeux lorsque la lumière de l'étrange bâton vint de nouveau éclairer la salle poussiéreuse. Sans jeter aucun regard à Salmon il se redressa et s'étira. A présent, il fallait engager le dialogue s'il ne voulait pas être obligé de l’assommer pour le ramener à Vlad.

-Vous n'avez pas perdu de temps. Venez avec moi un instant maître Al-Jabâr, nous devons parler.

Ahiyyad se détourna et s'enfonça dans l'ombre vers le cercle formé par les torches à présent éteintes.

Après un instant de flottement il le rejoignit et ils se firent face dans la lumière bleutée émise par le long bâton. Ils n'étaient qu'a trois pas l'un de l'autre.

-J'ai quelques questions pour vous.

-Vous n'avez pas perdu de temps. Venez avec moi un instant maître Al-Jabâr, nous devons parler.

Un vagabond arrive toujours à l'heure se disait Salmon, écoutant attentivement le Vampire qui voulait apparemment lui causer. Il l'invita plus loin dans la salle et Salmon le suivit, toujours Saphar à la main. Le Vampire avait un comportement étrange lors de son retour, on aurait dit... Qu'il avait l'intention de faire quelque chose. Ce n'était pas une amitié qui s'était tissé entre le Nocturne et le fantôme du désert et il préférait rester sur ses gardes.

-J'ai quelques questions pour vous.

Il s'arrêta, attendant de voir ce que le Vampire avait à lui dire.

-Vous comprendrez que je peux difficilement repartir d'ici sans informations. Mes supérieurs s'en trouveraient forts contrariés. Le prix de notre entente va donc être quelques questions. J'ai besoin de savoir, maître Al-Jabâr, qui vous êtes. D'où venez-vous. Quels sont vos buts. Depuis combien de temps arpentez-vous Naldor et surtout...Si vous avez des dispositions particulières vis-à-vis de ma patrie.

Ahiyyad se tut un instant, comme étonné de ses propos. Sa "patrie". Depuis quand Serkheim était-il sa patrie ? Il fallait croire que la discipline et les sermons de la Garde avaient fini par infecter sa pensée. Il grimaça. Cela ne lui plaisait pas.

-Quoi qu'il en soit je vous demande une chose. Ne me mentez pas. Et...

Le vampire sembla hésiter un instant puis se rapprocha sensiblement.


-J'aimerais ajouter quelque chose. Quelque chose qui ne doit pas sortir d'ici. Vous êtes vieux. Peut-être plus que les Prieurs. Alors dites-moi. Avez-vous jamais entendu parler de Japet ?

A ces mots, la lumière du Saphar parut vaciller et faiblir et les ombres semblèrent s'agiter. Devant les yeux du vampire, une scène vient se superposer au masque de son interlocuteur. Un grand individu vêtu misérablement qui répands feu et mort sourire aux lèvres.

Vous comprendrez que je peux difficilement repartir d'ici sans informations. Mes supérieurs s'en trouveraient forts contrariés. Le prix de notre entente va donc être quelques questions. J'ai besoin de savoir, maître Al-Jabâr, qui vous êtes. D'où venez-vous. Quels sont vos buts. Depuis combien de temps arpentez-vous Naldor et surtout...Si vous avez des dispositions particulières vis-à-vis de ma patrie.

Salmon baissa Saphar. Ces paroles reflétaient encore une fois une certaine mélancolie, voir même une amrtume. L'esprit du Nocturne recherchait des réponses, beaucoup de questions. Le fantôme du désert hésitait et se demandait par quoi commencer ? De plus, il comptait sortir d'ici et retourner à Serkheim sans tenter quoi que ce soit en dehors du temple ? Étrange, était-ce le soleil qui l'effrayait ?

Quoi qu'il en soit je vous demande une chose. Ne me mentez pas. Et...

Le Nocturne s'arrêta, hésitant.

J'aimerais ajouter quelque chose. Quelque chose qui ne doit pas sortir d'ici. Vous êtes vieux. Peut-être plus que les Prieurs. Alors dites-moi. Avez-vous jamais entendu parler de Japet ?

Japet.
Ce nom, il l'avait déjà entendu. Le Vampire Badlor a déjà mentionné cela et les connaissances de Salmon sur cet individu étaient malheureusement faibles. Salmon redressa Saphar et d'un ton fort il fit :

- Et bien, chacun possède sa propre part de mystère. Je ne vais pas te révéler mon identité cher Ahiyyad Al-Fahd car le faire ne mènerait à rien, enfin si, aux ennuis. Et par la flamme éternelle d'Irmo, les ennuis sont la dernière chose que je désir en ce bas monde. Peu importe mon âge, ce que je compte faire ou ce que j'ai fais, tu repartiras à Serkheim avec le même visage.

Le Nocturne posait bien des questions, le temps pressait et Salmon devait se mettre en quête du deuxième monolithe. Il lança un regard aux portes d'entrée du Temple et continua avec :

- Japet est l'un des premiers Vampires, disciple d'Hialmar, père de tous les Nocturnes. Pendant longtemps il terrorisa une grande partie des terres du Nedora, et puis il disparu sans laisser aucune trace. Je ne sais moi même pas s'il existe, et pour tout dire cela ne fait pas partie des choses que je veux, ou plutôt que je me dois de savoir.

- Mais toi...Tu sais qui il est. Fit Salmon avant de se diriger vers les portes du Temple qu'il ouvrit à l'aide de son bâton Saphar, laissant des rayons de lumières pénétraient dans la salle d'entrée.

- Et... Pour ton maître, fais-lui savoir que je serai à Riftwood dans un mois. Cela t'éviteras d'être torturé, aussi.

Le vampire observa Salmon disparaître par l'entrée lumineuse. Il n'était guère plus avancé et fut tenté un instant de continuer à suivre l'homme. Mais il s'abstint. Dans le désert et en plein jour, il le sèmerait vite. Mieux valait rentrer à Serkheim et faire son rapport au seigneur Vlad. Il ne serait pas satisfait, mais le vampire avait de quoi étancher sa soif d'informations. Et il prendrait sur lui d'envoyer ses subordonnés surveiller Riftwood.

Il repensa à ce que ce satané vagabond avait lâché.

"Mais toi...Tu sais qui il est."

Il n'aimait pas les personnes qui parlaient par énigmes. Il jeta un coup d’œil à l'ouverture qui laissait entrer les rayons du soleil. S'il recroisait un jour cet énergumène, il se montrerait moins clément.

Le feu brûlant de la colère salvatrice brûlait en lui, comme à chaque fois qu'il prononçait le nom abhorré. Oui, il savait qui il était. Il était un meurtrier manipulateur et cruel, un monstre vide de sentiments qui se cachait derrière les mots. Mais pas seulement. Quelque chose manquait au tableau, et ce quelque chose le Nocturne allait le découvrir.


Ahiyyad s'assit dans la pénombre du temple. Il dormirait assis là, au sein des ruines Sabliques jusqu’à la nuit, puis il partirait vers Nedora. Vlad l'attendait sûrement avec impatience. Décevoir le Fomoire, il ne s'y risquerait pas, même s'il savait qu'en pratique, ce dernier n'avait pas de véritable pouvoir sur lui.

Puisque Crios restait le véritable maître du jeune homme. Officieusement bien entendu.

Le silence était revenu dans le vieux temple où pourrissaient désormais les prières du peuple du feu.