« Ne touches pas à ça ».
Fit le vieux marchand qui jusque alors observait attentivement les jeunes qui trainaient dans les environs, attendant le bon moment pour s'emparer de cette épée. D'ailleurs, il y avait de quoi voler ; celle-ci était en or et Salmon fût intéressée par la marchandise. Il se rapprocha de la vieille tente presque déchirée et sale du marchand qui arrivait a peine à le protéger des rayons du soleil toujours aussi brûlant. Le marchand était un vieillard du nom d'Elbard, nom oriental. Cela n'étonnait en rien le fantôme du désert : les orientaux s'installaient souvent par ici afin de vendre certaines choses et ce marché-là était très fréquenté, par des personnages douteux comme bienfaiteurs. Mais la plupart d'entre eux étaient des voleurs et des brigands du sud, cherchant un moyen de toucher à l'argent pour survivre dans ce monde de folie, tout comme les autres. Mais Salmon ne se classait pas dans ce cadre, non, c'était déshonorant à ses yeux de vouloir vivre que pour les notions de la richesse ; lui, ce qu'il appréciait c'était l'aventure et la connaissance. D'ailleurs, la connaissance ! Il devrait penser à prendre deux ou trois livres pour l'accompagner dans ses futurs voyages. Les livres, chose qu'il appréciait beaucoup. La lecture aussi, il connaissait plusieurs langues et maîtrisait de riches écritures.

« Que voulez-vous, noble voyageur ? »
« Noble ? Oh » répondit Salmon en posant Saphar à terre, toujours à la main, « Noble est un grand titre pour un simple voyageur que je suis. Mais noble conviendrait parfaitement à cette épée que vous avez-là, étrange qu'elle demeure encore ici d'ailleurs ».
« Nombreux sont ceux qui la désirent, mais... » d'un air hésitant et suivit par un sourire, « Je n'ai pas été satisfait par les enchères ».
« Par les lunes de Seraf, quel dommage ! Et pourtant, cette épée mériterait l'attention du monde entier ! » s'écria Salmon d'un ton fort, attirant d'autres individus qui finirent par se rapprocher de la tente et qui jetèrent un coup d’œil à l'épée.

Le marché était actif. Cris, musiques, disputes, tout s'y rassemblait et cela ne semblait pas gêner le fantôme du désert. Il attendait là, assit sur ce banc en bois, à croire que même lui pouvait se fatiguer. Après quelques minutes d'attente un jeune homme à la chevelure blanche et aux vêtements de nomade se rapprocha de Salmon, portant sur lui un parchemin qui ne tarda pas à passer entres les mains de Salmon. C'était un messager, et lui les aimait beaucoup.

Un faucon était dessiné sur le parchemin et le message était bien clair. En réalité Salmon était présent en ces lieux pour empêcher quelque chose, un désastre. Une caravane transportant de pauvres gens capturés pour être transformés en de misérables esclaves qui finiront sous les mains d'un maître qui les traitera comme de vulgaires animaux ; l'une d'entre elle devait passer par ici. Salmon les suivrait dans le désert pour s'en emparer et libérer les esclaves, comme il le fait depuis longtemps. Le faucon, le message codé d'un de ses compagnons qui le tient au courant du commerce des esclaves et qui travaille sous le toit de celui qui dirige ce mouvement, payé par Salmon pour ces informations.

La voilà, la caravane était là.

▬ La cité d'Izalith, humf, une bien vieille légende... On ne sait même pas si elle a vraiment existé, et puis... Si c'était le cas, il y aurait encore le trésor. Murmura le voyageur, adossé contre le mur de la ruelle du marché. Plus bas était assit un jeune garçon.
▬ Un trésor ? Répondit le jeune, brusquement et particulièrement intéressé par cette histoire de trésor. Oui, ce conte.. Comme quoi la cité Izalith des Djinns serait encore engloutit dans les profondeurs des sables et cacherait un gigantesque trésor, là, ici même dans le Noara. Un héritage parait t-il. Salmon était de passage dans le marché, histoire de faire une pause et de marquer une nouvelle destination. Le but de Salmon? C'est bien une vaste question, et pour tout dire il l'ignore peut-être lui même. Ou alors il fait de sorte que l'on pense cela? Possible aussi, très possible même.
▬ Oui, un trésor. Un gigantesque trésor ! Avec toutes ces richesses en mains tu n'es plus un voyageur mais un Roi, si ce n'est un Dieu ! À ses mots, un nomade arrêta de fortifier son épée dans la forge d'à côté et se retourna vers les deux voyageurs. Il semblait connaître le sujet, et ne tarda pas à en témoigner.
▬ Haha, vous pouvez toujours courir, vous les voyageurs. Même les dieux en personnes sont incapables de retrouver cette cité ! Que feraient de simples voyageurs alors ? Les deux individus dévisagèrent le forgeron, se sentant humiliés. Certains riaient et d'autres fuyaient, comme si que parler de ces choses était de mauvais présage...
▬ Vous aussi, vous recherchez la cité des Djinns ? S'écria à nouveau le forgeron, s'adressant cette fois-ci au fantôme du désert.
▬ Oh, répondit Salmon, posant le bout de Saphar à terre et s'en servant comme un sceptre, loin de là, il y a dans ce monde des mystères et mieux vaux qu'ils en restent ainsi.
▬ C'est une très bonne vision des choses, le forgeron s'arrêta de fortifier son épée et se releva, s’essuyant sur son bas et se retournant vers Salmon, alors, quel est votre n-... Un instant de silence s'installa dans la forge, l'individu fixant Salmon d'un air étonné. Et oui, il l'était. Ce masque...
▬ Merveille ! Cria t-il, se rapprochant de Salmon tout précipité, passionné. Où avez-vous obtenu ce masque, étranger? . Salmon ne bougea pas, toujours le sceptre en mains. Il faisait jour, les dunes étaient agitées et le vent aussi, les tempêtes rejoignant le festival du désert, comme l'appelait Al-Jabâr.
▬ Je vois que vous êtes passionné par la forge, vous devriez peut-être aller faire un tour à la cité des Nains dans les célèbres monts célestes ; vous savez, tout forgeron s'y plaît. Un vrai paradis, comme ils le disent. Salmon essaya de contourner le sujet, mais le forgeron repris avec encore plus d'attention. Oh, ce masque... Oh, oui oui, je connais les monts célestes. Mon arrière grand-père y était déjà allé et je compte aussi le faire.. Mais pour le moment je me contente juste de survivre. Mais ce masque, d'où vient t-il? Il persistait encore et toujours. Salmon fit basculer son sceptre et répondit. Et bien, c'est un vieil ami qui l'a forgé. Un elfe, vieux, tout aussi passionné que vous et certainement comme votre arrière grand-père. Je n'en sais pas plus pour tout dire, j'estime qu'il provient des terres elfiques. Il s'arrêta pendant un instant et reprit. Les symboles sur ce masque signifient "Dol sâar nelo alberis" (Fils du désert) en langage Sablique.
▬ Vous parlez le Sablique ? Fit le forgeron, encore étonné. C'est, juste prodigieux ! Mon grand-père le comprenait lui aussi. Qui êtes-vous? Votre nom? . Salmon se redressa, hésitant et se questionnant sur la manière dont il devait lui répondre. Qui sait, peut-être était t-il complice avec les maîtres d'esclaves ? Les forgerons, souvent liés à ce genres de personnes. Elles ont eux aussi besoin d'armes. Il hésita pendant un bref instant et répondit. Mon nom n'a aucune importance, tout comme mon âge. Mais "le vagabond" suffira, ou "étranger" comme vous le dites. Étranger ? Loin de là ! Le désert et lui, une longue et vieille histoire ! Mais il se retient jusqu'à ce que le forgeron reprenne la parole.
▬ Je vois... Et bien, mes épées et mes boucliers m'attendent l'étranger. Au plaisir de vous revoir un de ces jours et que les dieux vous gardent, nous en avons tous besoin en ces temps maudits. Salmon le salua et reprit sa route... "En ces temps maudits", oui, quelque chose ne tournait pas rond dans le monde.

Quelque chose qui allait bientôt faire surface.