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Le tombeau, confident de mon rêve infini. [FB - 50 ans / solo]
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Viladra Memphis
Le tombeau, confident de mon rêve infini. [FB - 50 ans / solo]  Empty

CONQUÉRANT
Viladra Memphis

Perso
Description: – Aussi, vois ce souris fin et voluptueux Où la Fatuité promène son extase ; Ce long regard sournois, langoureux et moqueur ; Ce visage mignard, tout encadré de gaze, Dont chaque trait nous dit avec un air vainqueur :
Localisation : Dans l'ombre de la lune.
Messages : 286
Date d'inscription : 18/12/2012



Jeu 31 Jan - 17:02




Prémices...



"Quand parfois sur ce globe, en sa langueur oisive,
Elle laisse filer une larme furtive,
Un poète pieux, ennemi du sommeil,

Dans le creux de sa main prend cette larme pâle,
Aux reflets irisés comme un fragment d'opale,
Et la met dans son coeur loin des yeux du soleil."


Le tombeau, confident de mon rêve infini. [FB - 50 ans / solo]  132960430919mSanstitre

Il est des choses que l’on n’oublie pas… Des choses qui restent, qui flottent à la surface du conscient, ne faisant que l’effleurer afin de vous faire ressentir leur présence sans jamais s’arrêter. Ces pensées, parasites en perpétuels mouvements, ne cessent d’assaillir votre esprit, vous qui êtes faibles ou puissants, vous qui êtes anges ou démons… Ce sont ces pointes de souvenirs acérées, ces piques de glace qui s’enfoncent dans votre âme qui vous définissent. Par elles, vous vous rappelez votre nature profonde sans même vous en rendre compte… Vos joies, vos désirs mais aussi vos peurs, votre haine… votre impuissance, parfois. Ai-je ressenti ces émotions diverses qui traversent nos corps comme une flèche transpercerait du vulgaire papier ? Oui, car comme chacun d’entre vous, le temps, pourtant infini, ne cesse de me rappeler la différence entre la conscience et l’instinct.
Beaucoup d’épisodes de ma vie restèrent plongés dans l’ombre… Quels furent les moyens que j’employai pour devenir vicaire, comment de là je passai grand vicaire et surtout… Comment une simple mission me permit de passer fomoire, un grade aussi craint que désiré ? Aussi admiré que redouté ? Vous vous doutez bien que ce simple acte ne m’apporta pas le prestige et la richesse sur un plateau d’argent… Il me fallut ruser. Prendre des risques, aussi… Mettre ma vie en jeu. A l’époque, risquer mon existence n’était pas un jeu comme je le fais aujourd’hui. A ce moment-là, je voulais atteindre l’objectif de m’élever au sein de la hiérarchie, faire couler mon sang n’avait rien d’amusant… Et pourtant, il abreuva le sol tant et si bien que je fus étonnée plus tard de ne pas voir de fleurs écarlates en sortir.

Voilà, cinquante longues années sont passées entre le déclenchement et la conséquence. Il y a cinquante ans tout juste, j’entreprenais la fameuse mission qui, aux yeux de tous, m’accorda suffisamment de crédit pour que mon nom figure parmi les vingt figures emblématiques des fomoires… Mais pour connaître la réelle raison de mon accession aussi rapide, il faut remonter plus loin encore… Au temps où je n’avais encore qu’un siècle tout juste. Au temps où la lassitude était surpassée par l’excitation de l’ambition. Insidieuse, dévorante, cette envie de puissance me rongea de l’intérieur et fit disparaître mes derniers scrupules… Mais non mes dernières craintes.
Tout juste grand vicaire, j’habitais une maison luxueuse non loin du centre d’Akkaron, chargée de diriger plusieurs banques pour les services d’un fomoire particulièrement vénal. Le seigneur Keralwin avait toujours été un personnage charismatique malgré l’appât du gain qui exhalait de chacun de ses pores. L’apparence d’un homme d’une petite quarantaine d’années, âgé de trois siècles, il maniait les mots mieux que l’umbromancie et son regard était parfois plus pénétrant que l’art de la nécromancie… Oui, ce dirigeant zélé n’était sans doute pas le meilleur combattant des fomoires bien qu’il soit loin d’être faible, mais ses simples paroles suffisaient à apporter obéissance et respect autour de lui. Il m’était difficile de l’admettre, mais à ce moment-là, moi-même je me retrouvée parfois subjuguée par ses discours… Seule mon ambition persistante me permettait de garder les pieds sur terre. Sans elle… Peut-être doute aurais-je terminé ma vie parmi les favoris d’un fomoire capricieux mais terriblement manipulateur. Mais malgré tout ce qu’il représentait, il fut mon premier maître, celui qui m’enseigna la magie et qui ouvrit la porte intérieure de mon potentiel. Un homme à la mesquinerie dissimulée sous des airs charmeurs… Oh oui, je l’adorais en même temps que je l’exécrais… Je le désirais autant que je voulais le voir périr.

Tu ne sors pas, aujourd’hui ?

Relevant la tête, mes yeux fins se posèrent sur Faros et j’esquissai un mince sourire. Plein mois de Seolor, il faisait encore doux mais la fraicheur nouvelle était assez agréable. Bon nombre des nocturnes profitaient des nuits pour se dégourdir les jambes et s’entraîner en plein air, occupant leur journée à travailler. Venant d’être promue, j’occupais déjà une place importante au sein des banques dirigées par mon Seigneur et si les charges étaient plus importantes, j’étais néanmoins délestée des corvées les plus désagréables. Ainsi, tous les soirs, lorsque le soleil se couchait derrière les nuages sombres de Serkheim, j’étais libre de faire ce que je souhaitais… Bien souvent nous allions nous entraîner, Faros et moi, mesurant nos capacités et créant peu à peu une relation ambiguë. Il n’y avait aucun amour, là-dedans… Je ne m’abaissais plus à ce genre de faiblesses, mais nos liens étaient partagés entre la rivalité et la complicité… Ce qui n’était pas pour me déplaire.

Posant le stylet sur le vaste bureau de bois laqué, je me levai tranquillement et répondis d’un simple sourire. La jeune Servant positionnée dans un coin de la pièce leva ses yeux vers moi, semblant se demander ce que j’allais faire. L’informant que j’en arrêtai là pour aujourd’hui, elle retint à peine un soupir de soulagement qui se bloqua dans sa gorge lorsque je la fixai longuement.
Quittant enfin la pièce, je me dirigeai vers les escaliers, précédée de Faros. Il y avait trop d’oreilles, ici… Trop de bruits, je commençais déjà à me sentir mal.
Etouffant presque, quand nous mîmes le pied dehors, j’inspirai une longue bouffée d’air frais, fermant les yeux le temps de ralentir les battements de mon cœur. Je n’aimais guère rester enfermée dans des lieux confinés trop longtemps. Les employés des banques, les humains, les nocturnes… Tous, pourquoi se sentaient-ils obligés de polluer le silence ? Ils assaillaient mon crâne comme des couteaux se plantant dans mon corps…
Nous marchâmes un moment avant de gagner les vestiges d’une ancienne place. A ce moment-là, je ne savais pas encore que cinquante ans plus tard, je rencontrerai Ahiyyad Al-Fahd. Ici, il n’y avait aucun passage, nous étions libres de discuter en toute tranquillité… Nous juchant à nos places habituelles, c’est-à-dire au bord du seul toit encore entier, aucune parole ne fut échangée durant les premières minutes puis enfin, comme à son habitude, il lança le sujet.

J’ai pu me renseigner sur les prochaines missions qui vont être données… Je suppose que tu cherches quelque chose d’assez impressionnant pour te faire remarquer mais de pas trop long afin de ne pas faire trainer les choses… ?

« Il commence à bien te connaître, Viladra…
Ça en deviendrait même effrayant, huhu. »

Ces derniers temps, le seigneur Keralwin s’était désintéressé de moi. Je m’en moquais éperdument, mais la place privilégiée que j’avais toujours eue à ses côtés m’avait apporté bon nombre d’avantages et grâce à elle, peu de monde cherchait à me mettre des bâtons dans les roues. De plus, si mon prestige régressait, le fait qu’il m’oublie en revanche n’était pas pour me plaire… Je devais donc non seulement retrouver sa considération mais aussi celles des autres fomoires. Surtout celle de Vlad… Toi qui, d’un ordre simple, m’arracha ce qui m’était le plus cher. Mais il n’est pas bon de ressasser le passé, tout ce qui compte désormais pour moi est d’atteindre enfin le but que je me suis fixée. Vlad, Keralwin, Astérion, tous les autres… L’un d’entre eux devra disparaître et mon rôle était bien de causer sa perte.

Viladra ?

Redressant la tête, je vis alors le jeune vampire attendre une réponse, légèrement troublé par ce silence prolongé. Il était loin de savoir jusqu’où j’étais capable d’aller… Il ne voyait qu’un simple désir de gloire. Détrompe-toi, mon pauvre Faros…
Lui adressant un mince sourire, je répondis d’une voix neutre, refoulant mes réflexions en arrière.

Excuse-moi… Oui, quelque chose de rapide et de suffisamment difficile. Es-tu sûr que ton contact arrivera à influencer son seigneur fomoire… ?

Sans aucun souci. Affirma-t-il immédiatement, ce n’est pas la première fois qu’il le fait et il n’hésitera pas à recommencer si je lui demande…

Parfait. Tu m’es d’une grande aide, Faros, je ne l’oublierai pas.

Ho non, il s’agissait effectivement d’une promesse que je tiendrai durant de longues années. Mais que pouvais-je faire ? J’étais prête à signer tous les contrats qu’il fallait pour continuer… Et à en briser autant qu’il en faudrait.
Un nouveau silence s’installa, je me rappelai alors de la dernière idée qui m’avait traversé l’esprit. Retenant un énième sourire, je tournai mon visage vers le nocturne assis à mes côtés.

Dis-moi, as-tu entendu parler de mouvements de lycans, aux frontières ?Demandais-je d’un ton indifférent.

Pas que je sache. Pourquoi ?

Sentant sa méfiance, je me contentai d’hocher légèrement la tête pour leurrer mon camarade sur l’importance de mon interrogation et je reportai mon attention sur le ciel nuageux. Il n’était pas rare que les fomoires eux-mêmes se déplacent avec leur cohorte en cas d’attaque massive… Que ça soit des vampires nouveau-nés, des lycans, des humains chassant nos têtes… Et des accidents étaient si vite arrivés.

« Ca reste de simples accidents, Vil…
Il faut juste un déclencheur. »

Je commençais déjà à dessiner la mèche jusqu’à eux. Il ne restait plus qu’un simple éclat, une simple braise.
Mon regard s’illumina d’une flamme farouche.




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Jeu 7 Fév - 16:27




Préparatifs...



"Quand parfois sur ce globe, en sa langueur oisive,
Elle laisse filer une larme furtive,
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Je fus convoquée dans les jours qui suivirent. Un fomoire dont je ne retenais jamais le nom me confia une mission et je vis non sans surprise qu’il s’agissait de traquer des vampires nouveau-nés non loin du village Moridor en Orath. Pour l’occasion, je me vis offrir un artéfact me permettant de voyage au soleil et j’eus un nouveau cheval, plus rapide que ceux que j’avais eu précédemment. Apparemment, la réussite de cette quête leur était importante et je partis confiante. Inutile que je m’épanche sur ce combat car il fut peu difficile, un haut-vicaire et quelques nouveaux ralliés suffisant largement à s’en sortir face à des traitres… De plus, il s’agit d’une histoire qui fut déjà racontée.
Quand je revins quelques semaines après, peu de choses avaient changé et je fus gracieusement récompensée pour cette victoire, mon avancée sur l’échelon hiérarchique s’en faisant nettement ressentir. Malheureusement, si j’étais parmi les plus doués des nocturnes de mon rang, je n’étais pas la seule… Et l’un d’eux, à la botte de Vlad, rivalisait aisément avec moi. Argorath… Un haut-fomoire que je haïssais. Son simple nom était synonyme de colère, je ne pouvais imaginer une seconde qu’il vivait encore alors que ce fut sous ses ordres que celui que j’aimais me fut arraché. Ce sentiment d’impuissance… Le fait de ne pouvoir l’atteindre… Il me ronge, me hante, trouble mes pensées et cause une tristesse infinie. Vivre en le sachant en bonne santé, devoir le côtoyer, le voir, lui parler, supporter son regard… Serrer les dents et baisser les yeux. S’écraser, se taire, disparaître… Se renier soi-même. Oh désespoir…

Quinze ans passèrent, je continuais les missions les unes après les autres, enrichissant mon panel de réussite et regagnant ainsi la place privilégiée auprès de mon seigneur ainsi que l’estime des autres fomoires. Elève secrète d’Astérion, nous nous entrainions très souvent la nuit dans son domaine et je revenais éreintée mais jubilante de chaque joute qu’il m’accordait.
Il était tard lorsque je déposai ma monture à l’écurie. Possédant ma propre demeure, les hauts-vicaires au service du seigneur Keralwin et ceux servant Vlad n’étaient pas bien loin, les quartiers riches se trouvant tous au même endroit. Souvent sur le terrain bien que mes fonctions auraient pu me permettre de rester à l’aise et donner des ordres à distance, je n’étais pas souvent chez moi ce qui me permettait de ne pas croiser les nocturnes que je ne supportais pas… Malheureusement, tout ne se déroulait pas comme je le souhaitais et ce sentiment de faiblesse me rattrapait, enserrant ma gorge une fois de plus. Si seulement j’avais pu me montrer plus forte…
Marchant dans les rues sombres d’Akkaron, l’acier de mon épée cliquetant contre ma hanche, je passai une main le long de ma tête et détachai le lien de cuir, libérant ma chevelure qui se déversa en cascade sur mon dos. Fermant les yeux, mémorisant le trajet et laissant mes jambes me guider d’elle-même, le silence m’entourait complètement. Complètement… ? Je tournai au moment où une main se posait sur mon épaule.
Mon regard s’embrasant, mes dents se crispant, je sentis tout mon corps se tendre tandis que je réfrénais un tremblement. Ses yeux… Son regard, si narquois, si tranchant… Sa bouche qui s’ouvrait d’un sourire serpentin, le contact même de ses doigts… Je me dégageai d’un geste souple, mesurant la violence de mes mouvements, consciente que mon seigneur avait une notoriété beaucoup moins importante que celle de Vlad. Oui… Les vicaires se hiérarchisaient entre eux selon la puissance de leur seigneur, et de toute évidence, si je n’étais pas dans les plus faibles… Keralwin n’était pas le plus influent non plus.

Bonsoir, Viladra…

« Ho non…
Courage, Viladra… »

Ses mots… Sa voix… Tout me dégoutait en lui. Je sentais presque mon estomac se contractait tandis que je luttais silencieusement, le souffle coupé, pour ne pas dégainer mon arme… Pour ne pas lui lacérer le visage de mes ongles, arracher ses yeux, arracher sa gorge de mes dents. Je luttais pour ne pas perdre le contrôle, pour que mon visage affiche toujours cette impassibilité qui fit de moi, une nocturne respectée. Mais il me connaissait… Il était le seul à s’être rappelé de cette jeune humaine qui s’effondra lorsque le cœur de celui qui fut ma moitié se fit transpercer. Nous n’en parlâmes jamais mais je sais qu’il le sait et il sait que je sais qu’il sait. Ce jeu insidieux et dévorant, ce jeu morbide qui gangréna mon âme, ma conscience. Mon être tout entier…
Inclinant légèrement la tête, esquissant un sourire, je sentis mon cœur ralentir et ma gorge se desserrer suffisamment pour que je puisse répondre d’une voix que j’espérai tranquille.

Argorath. Quelle plaisir de vous voir ici… Mais il se fait tard, je vais de voir y…

Il n’est jamais trop tard, pour un nocturne. Me coupa-t-il d’une voix douce qui me fit taire instantanément. Surtout pour un nocturne…

Ne répondant pas, je me contentai de soutenir son regard mais je vis dans ses yeux la satisfaction d’une joute remportée. Une nouvelle fois, un frisson désagréable parcourut mon échine et je sentis un imperceptible tremblement. Faites qu’il ne l’ait pas remarqué… Par Sam’Ael, notre père à tous, empereur de la nuit et maître des ombres… Faites qu’il ne l’ait pas remarqué.

Tu sembles avoir froid.

Cette voix goguenarde… Ce ton mesuré, dosé à la perfection pour me faire comprendre que mes espoirs étaient vains. Le craignais-je ? Je n’en étais pas sure… Pouvais-je lui tenir tête ? Etait-il plus fort que moi ? Je n’en savais rien, mais je ne pouvais m’empêcher de me rappeler son éclat de rire lorsque l’exécution eut lieu. Son rire qui s’éleva alors, couvrant mon hurlement pour s’élever dans les ténèbres de la nuit… Et ses ordres lancés comme on jette des graines aux animaux. Indifférent, presque méprisant… Il jouait des malheurs des autres.

En effet, le vent est frais, cette nuit… Répliquais-je, la voix vide.

Ma réponse ne sembla guère le troubler. Pitoyable… Ma répartie, dont j’étais pourtant fière à certain moment, faisait pâle figure devant ce personnage haï.

On m’a raconté tes exploits, en Orath. Reprit-il, ce ton toujours aussi mielleux. Tu as su ramener de la chair à canon et tu as exterminé rapidement les traitres à notre race… Je suis impressionné.

Voilà qui me fait grand plaisir, Argorath.

Je suis aussi très étonné que tu n’aies pas failli à ta mission...

« Comment ose-t-il… ! Ne l’écoute pas… »

Mon sang se glaça. Doutait-il en plus de mes capacités ? Croyait-il que je n’étais pas capable de me débarrasser d’une poignée de faibles ? Ouvrant la bouche pour une réplique acerbe, la colère ayant fait voler mes craintes en éclat, il me coupa une nouvelle fois.

Je suis ravi de voir que tu n’as pas eu de problème à faire la part des choses. Lâcha-t-il, son sourire soudain me figeant le sang. Les traitres… se doivent d’être exterminés. Qu’ils se trouvent en Orath ou bien… au sein de notre propre royaume. Bonne soirée à toi, Viladra…

Pétrifiée, le sens caché de ses mots se fichant dans ma poitrine, je le vis s’éloigner d’une démarche tranquille, ne prenant même pas la peine de savourer la stupeur qui traversa mon visage. Pourquoi jouait-il ainsi…
Cette fois-ci, je ne pus me retenir et je sentis mon corps se mettre à trembler. Sentant le sol vaciller, je tombai à genoux et ne pus m’empêcher de sentir les larmes de couler. La rage, la rancœur, la tristesse, la souffrance… Tout se mettait à tourbillonner autour de moi, floutant ma vision et emmêlant les bribes de mon âme. Dans des sanglots incontrôlables, je perdais pied avec la réalité… Je ne sentis même pas ces bras qui se refermèrent autour de moi, cette voix qui murmurait à mon oreille des paroles réconfortantes, cette chaleur soudaine qui réchauffait la froideur de mon être. Et je pleurai… Longtemps, des minutes entières, peut-être même une heure. Je pris peu à peu conscience de la présence de Faros à mes côtés, son odeur, sa voix. Pourquoi fallait-il que je le croise dans une situation pareille…
Le repoussant sans douceur, je me relevai, titubant légèrement avant de lui faire face. Je savais que mon visage portait encore les traces de larmes mais j’avais repris mon air sévère. Il me regardait, ne disant rien, se contentant tout simplement d’être là et si je m’apprêtais à lui lancer une remarque désagréable, je ne fis finalement rien et tournai les talons avant de m’éloigner. Non… il ne fallait plus que je me laisse aller ainsi, ou alors la faiblesse et la médiocrité me rattraperaient et je me perdrai à jamais.

Ma nuit fut courte. Les nocturnes dorment le jour et vivent sous la lune, mais je fis exception à la règle et je me levai alors que le soleil était haut dans le ciel. La pénombre éternelle de Serkheim nous permettant de nous déplacer sans problème, je gagnai la banque principale d’Akkaron et croisai Faros dans les couloirs. Nous saluant comme si rien de la veille ne s’était passée, il me suivit jusqu’à mon bureau et je vis qu’un jeune servant m’attendait. Porteur d’un message, je pris le temps de m’installer derrière la vaste table et posai mon regard sur lui, sentant son trouble et sa gêne.

Dame Memphis… dit-il, regardant un point derrière moi. Le seigneur Keralwin vous informe qu’il serait bon que vous le rejoignez rapidement, quelques fomoires se réunissent bientôt pour… pour parler d’un mouvement lycanthrope à nos frontières. Il tient à ce que vous l’accompagnez…

« Ca alors…
Voilà qui tombe à point… »

Bien, merci. Répondis-je après quelques secondes de réflexion. Savez-vous qui se trouvera à cette réunion ?

Ho… Il y aura le seigneur Vlad, sans doute avec messire Argorath, le seigneur Astérion en compagnie de Leinan et… et…

Voyant qu’il ne savait plus, je le fis disposer et me tournai vers la fenêtre. Dans mon dos, je sentais Faros qui se tenait debout et j’avais conscience qu’il comprenait ce à quoi je pensais. Oui… Il était temps de commencer à mettre en place les rouages de la grande machinerie… Mais pour cela, il fallait trouver quelqu’un, le pion de mon échiquier qui partirait en avant afin de se sacrifier.

A qui penses-tu ?

« Encore une fois, il sait à quoi je pense… »

Me tournant vers lui, je réfléchis quelques secondes. J’avais assis ma progression sur la manipulation, la fourberie et l’absence de scrupules. En revanche, j’avais toujours pris soin d’épargner ceux qui méritaient de l’être, m’acharnant sans difficultés sur les nocturnes véreux et cupides. Ce n’était pas compliqué, ils étaient presque tous ainsi… Et des pigeons, j’allais en avoir à la pelle. Mais lequel choisir ? C’était difficile… Quand l’évidence s’imposa d’elle-même. Cette simple idée me gagnant, comme une écume puis comme une vague renversante, mon sourire s’agrandit jusqu’à faire apparaître l’éclat glacial de mes dents pointues. C’était risqué, mais la satisfaction serait telle que je ne pouvais pas ne pas essayer. Ho… Si je réussissais, je serai enfin au bout de longues années d’haleine.

Je ne sais pas encore…

Il n’insista pas. Il fit bien car il savait que je ne lui aurais rien dit même si le contraire de mes paroles s’afficher dans mon air sombre et mon sourire triomphant. Ne vendons pas la peau du knarg avant de l’avoir tué…

Debout derrière la chaise du seigneur Keralwin, cinq autres fomoires se tenaient assis autour de cette table ronde, présidée par Astérion, le chef de la garde noire. M’adressant un bref regard, il prit ensuite la parole. Je ne voyais que trop bien les tensions qui régnait entre les quatre autres seigneurs… Le mien ne cessait de serrer les poings sous sa table à chaque parole de Vlad et je compris que la politique de Serkheim était loin d’être aisée…
Le seigneur Astérion annonça alors des informations venant de ses agents disséminés dans le royaume. Selon lui, un important mouvement de lycans se crée dans le passage d’Emroth, chose inhabituelle pour une race aussi solitaire. Selon les espions, cela durait depuis maintenant plusieurs années, le nombre grossissant lentement mais surement, atteignant désormais presque une centaine. Il semblait que les lycans s’alliaient momentanément bien que leur nombre croissant à faible vitesse, et que leur objectif n’était autre que Serkheim. Des loups-garou aux instincts primaires qui ne différaient pas grandement de l’animal… Un peu comme les vampires nouveau-nés, mais en moins bestial. C’était tout de même une nouvelle assez inquiétante, suffisamment pour que le gouvernement des nocturnes prenne des mesures…

Deux cohortes accompagnées de leur seigneur seront envoyées sur place. Décida le maître de cette réunion d’une voix posée. Les autres devront porter assistance matérielle, médicale et financière… Certains d’entre vous souhaitent-ils particulièrement prendre part au combat… ?

Lorsque le seigneur Vlad se proposa, je ne fus guère étonnée de voir que Keralwin faisait de même, sans doute pour pouvoir avoir une nouvelle occasion de se mesurer à son rival. Voyant le sourire goguenard d’Argorath, nous nous fixâmes un long moment avant que le seigneur Astérion ne mette fin à ce rassemblement, déclarant que les préparatifs commenceraient dans un mois et qu’une décision serait prise plus tard. Devons-nous aller les chasser directement ou bien attendre qu’ils se mettent en mouvement ? Nous savions que la bataille serait gagnée d’avance puisqu’il s’agissait de lycans primaires sans véritable organisation, mais il était tout de même possible d’essuyer quelques pertes. Quand je compris que la décision revenait au seigneur de la garde noire… Je compris qu’il était dans mon intérêt d’influencer son choix. Mais on ne manipulait pas Astérion comme on le voulait… Il me faudrait du temps et de la réflexion.

Alors, comment était-ce ?

Ramenée à la réalité, je me rendis compte que je venais de quitter le manoir et que Faros m’attendait dehors. Le fixant longuement jusqu’à ce qu’il hausse un sourcil, légèrement étonné, je compris que j’allais aussi avoir besoin de lui. Il me faudrait piéger la bête, mais avant ça, un leurre serait nécessaire…

Très intéressant, dis-je enfin, je te raconterai plus tard. Je dois voir le seigneur Astérion, ce soir, je compte sur toi pour…

… te couvrir, oui, ne t’inquiète pas.

« Il est temps de commencer, Vil’ ? »

Oui, les pièces devront bientôt être installées sur l’échiquier. Bientôt la partie commencerait, et je comptais bien prendre les blanches… Un coup d’avance pouvait changer le destin.




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Jeu 7 Fév - 17:10




La fin des espérances.



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Cinq années passèrent sans qu’aucun incident ne survienne. Les mouvements lycans s’étant réduits, les fomoires estimèrent que la situation n’exigeait pas encore de préparations et la vie reprit son cours avec la lenteur et la patience nocturne. Poursuivant mon ascension, je maîtrisais désormais l’umbromancie avec brio mais je me gardai bien de le montrer, préférant attendre mon heure : celle où un des vingt dirigeants finirait par tomber… Je me tenais à l’affut, prête à prendre la place, dédaignant avec mépris ceux qui pensaient pouvoir rivaliser avec moi. Néanmoins, il en restait toujours un qui me faisait l’effet d’une épine dans le pied… Toujours le même.
Argorath ne se privait pas pour montrer l’étendue de ses capacités et j’avais compris, à mon plus grand regret, qu’il était encore devant moi… Ca m’était difficile de l’admettre, mais sa pratique de l’umbromancie et de la nécromancie était largement avancée et même les fomoires voyaient d’un mauvais œil cette puissance grandissante… Car dans ce genre de lieu, il faut écraser les autres pour prendre sa place. S’il devait y avoir un duel, je n’étais pas incertaine de le perdre face à un fomoire, mais j’étais en revanche sure d’une chose : Argorath triompherait aisément face aux plus faibles d’entre eux et tiendrait tête sans difficulté à ceux d’un niveau supérieur. Oui, c’est dur à le dire mais… Il avait désormais le niveau d’un bon fomoire.

Il faisait un hiver assez frais, le genre de temps que j’apprécie bien que les humains sortaient emmitouflés et que les rues se vidaient tôt. Ma charge de travail principalement déléguée à des subalternes, je continuais mes entrainements nocturnes en compagnie du seigneur Astérion qui, considérant que je n’avais plus besoin de lui pour l’umbromancie, entreprenait de me faire progresser sur la voie de la nécromancie. Bon professeur, il était patient mais savait me montrer où était la limite à ne pas dépasser… Il ne tolérait pas l’échec et refusait que je me laisse aller, m’obligeant à donner le meilleur de moi-même. Eprouvais-je de l’affection pour lui ? En ressentait-il aussi ? Nous n’étions ni amis ni amants mais il était évident que notre relation sortait de l’ordinaire. Oui, je voyais en lui un mentor et j’étais son élève prodige, la seule qu’il accepta de former jusqu’au bout. Je lui devais beaucoup et il me faudrait du temps avant d’estimer que le service était rendu… Et au vue de notre vie éternelle, je risquais de me retrouver enchaîner un bon moment.
Assise sur mes genoux au milieu d’un vaste salon, il se tenait face à moi, confortablement assis sur un fauteuil. Le sol glacé me meurtrissant les genoux, le cadavre d’un homme nous séparait et j’avais les mains tendues au-dessus de lui. Dans un silence complet, j’invoquai alors le pouvoir de la résurrection, sentant l’énergie et la magie affluer en moi. Sans faire de commentaire, il se contentait de m’observer, prêt à stopper le rituel si un accident venait à s’imposer.

Concentre-toi…

Sa me parvenait à peine mais tous mes sens étaient en éveil. Les premières lueurs d’un violet sombre apparaissant autour de moi, un cercle de fumée se créa progressivement sous la cible et je commençai à murmurer les rites qui, plus tard, se feront sans que je prononce un mot. Enfin, je commençais à sentir les premiers battements de cœur dans sa poitrine, puis le sang affluer dans ses veines, irriguant ses poumons et son cerveau. Sentant un sourire jubilant étirer mon visage, je retins presque un hoquet de joie quand le corps prit une soudaine inspiration avant qu’il ne crachote quelques caillots de sang séché. Ses yeux s’ouvrant brutalement, il nous fixa, terrifié et je levai mon visage vers mon professeur. Esquissant l’ombre d’un sourire, il hocha légèrement la tête et se leva sans se presser.

Voilà la cinquième résurrection humaine que tu réussis… Dit-il alors de sa voix grave. C’est vraiment satisfaisant, beaucoup plus que ce que l’on pourrait attendre de la part d’un vicaire.

Acceptant ses compliments, assez rares dit en passant, de bonne grâce, je renvoyai mon nouveau serviteur et me relevai, grimaçant lorsque des douleurs assaillèrent mes genoux. Oui, bientôt je passerai maître en nécromancie…
Quelques minutes passant sans que personne ne prit la parole, le seigneur fomoire se tourna finalement vers moi et je compris qu’il était temps de parler de choses sérieuses.

Tu es talentueuse, Viladra…

Merci, mon seigneur.

… Il serait dommage de gâcher un potentiel pareil dans des occupations aussi futiles que celles d’un vicaire.

Mon cœur battit un peu plus vite à ses mots mais je m’abstins de répondre, attendant patiemment qu’il poursuive.
Son regard plongea dans le mien et m’évalua lentement, de cet air perçant qui lui allait si bien. Enfin, il sourit à nouveau et reprit la parole d’un ton calme malgré l’excitation qui montait en moi.

Je pense que tu vaux largement une place parmi nous… quand on voit certains fomoires qui siègent actuellement à la table des vingts… Sache, Viladra, que la patience qui nous est si chère n’est pas applicable en toute circonstances. Il arrive parfois que le destin ait besoin d’un… coup de pouce.

Par coup de pouce, vous voulez dire…

… Rien de plus, rien de moins, Viladra. Me coupa-t-il avec un sourire entendu. Je ne suis là que pour te soutenir si tu as besoin… D’un peu plus de force, c’est tout. Rien d’illégal en soi…

J’avais désormais une autorisation, celle que j’attendais. Hochant légèrement la tête, je m’inclinai profondément puis disposai de sa présence, quittant son immense manoir de Naham Dur pour rejoindre ma monture, l’enfourcher et m’en allai. Oui, il ne restait plus qu’à me faire une petite place et bientôt, bientôt… Qui sait, peut-être que dans une vingtaine d’années je pourrai regarder le seigneur Vlad et ses sbires, le sourire aux lèvres… Ha, cette simple idée me donnait des frissons. J’étais si heureuse qu’une nouvelle pensée vint m’effleurer. J’étais capable de ressusciter un corps… ? De transférer une âme dans un réceptacle… ? Pourquoi ne tenterais-je donc pas de… le ramener à la vie, lui que j’aimais à la folie, qui fit de moi celle que je devins par la simple force de son amour inconditionnel… ?
Quittant la route, j’obliquai alors vers les alentours d’Akkaron, cherchant un endroit tranquille… Et une proie.

Quelques heures plus tard, je trainais le corps d’un humain jusqu’à une clairière isolée, son sang se déversant encore de sa gorge tranchée. Oui, j’avais commis un meurtre sur un citoyen du royaume… Mais dans un cas comme dans l’autre, il rouvrirait les yeux et personne ne pourrait m’accuser de rien. De toute façon, je ne comptais pas le laisser mort longtemps…
Préparant le rituel, je commençai alors l’invocation. Son nom, sa présence… Il me faudrait peu de temps, je le connaissais si bien…
Mon esprit vola dans le labyrinthe de l’inconscience, transcendant la frontière entre le vivant et la mort, effleurant le réel au l’illusion jusqu’à se perdre dans les méandres d’un monde d’âmes égarées. Je cherchais, longtemps… Guidée par le souvenir de son odeur, de sa peau contre la mienne, le chemin jusqu’à lui fut lumineux et sans encombre… jusqu’à ce que je tente de saisir sa conscience et qu’elle ne glisse entre mes doigts…

Non… non…

Mon esprit s’agrippait en vain à cette fumée éphémère qui se désagrégeait entre mes doigts. Je lançais toute mon énergie pour l’attirer à moi, l’étreindre, pour le ramener à mes côtés… Simplement lui parler…
Sa silhouette fantomatique semblant se tourner vers moi, je sentis ma conscience se figer tandis que son regard si perçant me déshabillait d’un simple effleurement.

Caym !

Ma voix résonna dans ce monde de ténèbres, fit vibrer l’atmosphère et reculer les consciences aux alentours. J’y plongeais la puissance accumulée jusque-là, le sommet du pouvoir d’invocation. J’y laissais aussi ma tristesse, mes angoisses… mes supplications. Mais ce sentiment d’impuissance m’envahit à nouveau et je le vis disparaître tandis qu’une douleur insurmontable tambouriner contre ma poitrine. Je sentais comme un gout de sang entre mes lèvres mais la saveur plus amer de la défaite était bien pire…

CAYM !!

Un hurlement… Il l’entendit, j’en fus persuadée mais le simple murmure qu’il répondit me transperça comme un couteau chauffé à blanc. Dit-il mon nom… ? Je ne compris rien, je vis à peine ses lèvres remuer tandis qu’il me tournait le dos, s’éloignant de moi sans que je ne puisse le poursuivre. Retourne toi… regarde-moi… Pourquoi t’éloignes-tu ainsi ?
Toutes ces questions qui m’assaillaient, pourquoi n’y répondait-il pas… Je ne comprenais pas, le rituel était pourtant parfait.
Expulsée à la réalité, je repris brutalement conscience avec le monde vivant et tombai lourdement à genoux, hoquetant jusqu’à ce qu’un filet de sang jaillisse de ma gorge, éclaboussant le cadavre encore chaud. Prise de tremblements incontrôlables tandis qu’une partie de mon fluide vitale continuait de se déverser d’entre mes lèvres à chaque spasme, je m’entendis plus que je me sentis éclater en sanglot. Des pleurs incontrôlables synonymes de faiblesse et de rage. L’eau coulait le long de mes joues sans que je ne puisse l’arrêter, se mêlant au liquide sombre qui tombait au sol, absorbé par la terre comme une marque que l’on efface d’un geste négligeant.

« Viladra…
Pourquoi… Dis-moi pourquoi…
Viladra, calme toi… »

Je… Je ne comprends pas… hoquetais-je malgré moi. Pourquoi…

Parce que tu es trop faible, bien sûr. Me répondit-on soudainement derrière moi. Pour quelle autre raison subirais-tu cet échec, sinon ?

Mes sanglots s’arrêtèrent d’un coup tandis que je me figeais, l’hémorragie interne venant brusquement de prendre fin. Me redressant lentement, je me levai avec une vitesse calculée tandis que je combattais ces tremblements qui ne cessaient pas. Des tremblements de rage, cette fois…
Me retournant sans me presser, mon regard se planta dans celui d’Argorath qui ne se priva pas d’afficher tout le mépris et la morgue qu’il ressentait à mon égard. J’avais enduré tellement de sa part… Ses mots, ses contacts, même plus encore parfois… Comment pouvait-il penser un seul instant que j’arriverais à me maîtriser à un moment pareil…

Je… commençais-je, avant de laisser la fin de ma phrase se perdre dans le vent.

Tu ?

J’inspirai longuement, ramenai mes cheveux en arrière avec une lenteur calculée puis posai tranquillement ma main sur la garde de l’une de mes épées. J’étais affaiblie, j’avais dépensé beaucoup d’énergie dans ce rituel et je n’étais pas au sommet de mes capacités… Mais qu’avais-je à y perdre ? Tout ce chemin parcouru… Pour me rendre compte qu’il m’était impossible de le ramener. Désormais, vive ou mourir m’importait peu…

Je vais vous tuer, seigneur Argorath.

Mes mots s’échappèrent de ma bouche avant même que je ne puisse les retenir. Tant de rancœur, cette haine refoulée qui surgissait d’un coup… Je voulais baisser les bras, me laisser aller. Mais avant cela…
Une nuée sombre jaillit vers lui, enveloppant ses jambes avant de monter jusqu’à son torse et d’enserrer sa gorge. Surpris, il ne s’attendait sans doute pas à ce que je maitrise aussi bien l’umbromancie mais alors que j’allais serrer le poing, signe d’exécution, un mince sourire se dessina sur son visage et je sentis l’angoisse me gagner. On ne se montrait pas si confiant lorsque la mort était proche… Mais l’était-elle vraiment.
Les ombres que j’avais invoqué se desserrèrent brusquement et s’évaporèrent sans lui laisser la moindre marque. Figée, je le vis épousseter consciencieusement un grain de poussière sur son épaule avant de relever la tête vers moi.

Jolie démonstration d’umbromancie… Remarqua-t-il, badin. Mais je te pensais plus forte que ça. Dommage.

Sur ses mots, je vis à peine arriver le lien de fumée qui m’enserra la taille, me tirant violemment en avant tandis qu’une douleur insupportable irradia de mon ventre. Je sentis du sang m’éclabousser le visage tandis que je m’étalai au sol, trainée sur plus d’un mètre avant de m’arrêter dans des soubresauts. Un hurlement déchirant ma gorge, il se perdit dans la nuit tandis que je pressai mes mains sur mon abdomen. Une plaie béante s’ouvrant sous mes doigts, je sentis aussitôt ma vie me quitter au même rythme que mon fluide vital abreuvait le sol. Sans même m’achever, d’un dernier regard méprisant, Argorath s’approcha de moi, son visage se floutant sous les larmes de la douleur. Et de l’impuissance.

Trop faible, Viladra… Me murmura-t-il à l’oreille. Lorsque je deviendrai fomoire, après m’être débarrassé de ton ridicule seigneur, tu me supplieras quand je deviendrai ton maître.

Ainsi, il ne souhaitait pas me voir mourir mais souffrir. Ses paroles, si cruelles… Si vraies, aussi. Pourquoi n’étais-je donc pas plus forte… Aurais-je pu lui tenir tête si je n’avais pas été affaiblie par le rite nécromantique ? Sans doute. Mais aurais-je pu le vaincre… ? La réponse s’instaurait d’elle-même et le gout aigre qu’elle me laissa dans la bouche m’accompagna dans l’inconscience.

Je me réveillai plusieurs jours plus tard. A mes côtés, Faros, comme toujours, veillait sur mes soins et je n’eus le courage de le renvoyer. Ma blessure nettoyée et bandée, le temps passa si vite que je ne me vis pas guérir. Quand je pus retrouver goût à mon existence, cinq nouvelles années étaient passées sans que je ne les voie passer et un plan de guerre était en place.
Forcée de me réhabituer à tout ce que j’avais raté, le seigneur Astérion vint à jour me retrouver dans ma demeure pour fignoler les derniers plans à instaurer. Le simple fait d’évoquer que ma vengeance arrivait bientôt suffit à me donner de nouvelles forces et je compris qu’il était enfin temps de commencer la partie…





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Viladra Memphis
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CONQUÉRANT
Viladra Memphis

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Description: – Aussi, vois ce souris fin et voluptueux Où la Fatuité promène son extase ; Ce long regard sournois, langoureux et moqueur ; Ce visage mignard, tout encadré de gaze, Dont chaque trait nous dit avec un air vainqueur :
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Jeu 7 Fév - 17:17




Echec.



"Quand parfois sur ce globe, en sa langueur oisive,
Elle laisse filer une larme furtive,
Un poète pieux, ennemi du sommeil,

Dans le creux de sa main prend cette larme pâle,
Aux reflets irisés comme un fragment d'opale,
Et la met dans son coeur loin des yeux du soleil."


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Marchant dans l’allée brumeuse du quartier riche, je vérifiai que personne ne me suivait et en cette nuit avancée, il n’y avait pas âme qui vive. Les soldats étaient en salle d’entrainement, les humains dans leur lit et les commerçants devaient faire les comptes de leur journée… Et moi, je me rendais chez Argorath.
L’esprit tranquille, la respiration paisible, j’avais changé. Cinq années… C’est si peu de temps chez les nocturnes, mais elles m’apportèrent la sérénité et le sang-froid qui me délaissèrent durant quelques temps. Désormais, j’avais récupéré une partie de mes capacités mentales et mon âme s’était faite d’une solidité d’acier… Un acier trempé dans le sang.
Quand j’atteignis les limites de son domaine, des pas dans mon dos m’interrompirent et je retins un sourire avant de me retourner.

Bonsoir, seigneur Argorath.

Me délectant de la surprise et de la méfiance qui traversèrent rapidement son visage, je fis fie de son sourire arrogant et me contentai d’hocher légèrement la tête lorsqu’il esquissa une légère courbette de salutation. Ce regard… Je le haïssais toujours autant mais cette haine me rendait plus forte et ne faisait qu’effleurer ma barrière mentale. Oui… La Viladra fragile et facilement cassable était derrière moi, désormais.

Viladra. Lâcha-t-il, suave. Quel plaisir de te revoir après tout ce temps… Que viens-tu faire ici ?

Je n’ai guère le temps de bavarder… Je voulais savoir si tu étais prêt à m’accorder une nouvelle joute…

« Viladra…
Tout est prévu, Kale, ne t’inquiète pas… »

Le silence s’installa quelques secondes avant qu’il ne reprenne la parole, d’une voix méfiante malgré son calme omniprésent.

Une nouvelle joute… ? Pourquoi donc, souhaites-tu perdre encore une fois ?

Voilà une réponse digne d’un nocturne qui doute de ses capacités maintenant que j’ai progressé…

Ma réplique fusa d’elle-même, préparée avec soin et déjà porteuse d’efficacité. Il blêmit quasi-imperceptiblement mais reprit rapidement contenance.

Tu me donnes bien envie de te prouver le contraire maintenant, Viladra… Mais je fais partie des organisateurs du combat qui approche, je n’ai pas de temps à te consacrer…

Ouvrant la bouche, prête à sortir une nouvelle réponse calculée, il m’en ôta la possibilité en reprenant avant que je ne le puisse.

… Mais tu sembles être attachée à ce combat perdu d’avance. Poursuivit-il avec morgue. Alors pourquoi pas ? Je suis quelqu’un de magnanime… Néanmoins, il est mal vu d’un haut gradé de s’affronter avec un vicaire…

« Grand-vicaire, imbécile… »

… Mais si tout ceci reste entre nous, et je pense que tu ne souhaiteras pas répandre ta défaite, je te l’accorde avec plaisir… Quand souhaites-tu établir ta punition ? Ce soir me semble être un peu hâtif.

J’eus beaucoup de mal à garder mon calme, je jubilais intérieurement et j’avais envie d’hurler ma joie au monde, à la nuit, à la lune et à tous les êtres qui étaient en capacité d’entendre… Au lieu de ça, je me contentai de pencher légèrement la tête, faisant mine de réfléchir. Enfin, je répondis d’un ton calme, y laissant percer une pointe de satisfaction sur laquelle il se méprit.

Demain soir… Dans la clairière nord près de l’ancien temple… Il y a personne là-bas et personne n’en saura rien… à condition que tu arrives à tenir ta langue, évidemment.

Me permettant le luxe de lui adresser un sourire narquois, je fixai une dernière fois son visage figé par une surprise difficilement contenue et tournai les talons en sens inverse, après avoir vérifié une énième fois que personne ne nous avait vus. J’avais bougé la première pièce, il était temps qu’Astérion fasse de même…

Le lendemain, une nouvelle réunion eut lieu, présidée par le seigneur Astérion en compagnie de Vlad, Keralwin et quatre autres fomoires. Le commandant suprême de la garde noire annonça alors les tâches de chacun, les fomoires Vlad et Keralwin seraient chargés d’envoyer leur cohorte et de les accompagner. Les autres seraient là en soutien e n’interviendront pas… Les lieux des assauts étaient confidentiels, ils seraient donnés aux soldats au tout dernier moment avant que rien ne s’ébruite et que le principe d’attaque surprise soit conservé. Chacun donna alors sa parole de fidélité et de silence et les préparatifs de fin commencèrent dans les heures qui suivirent. Comme prévu, Argorath ne vint pas me parler, conscient qu’aux yeux de tous, nous ne nous étions jamais vus l’avant-veille et aucun combat n’était censé avoir lieu…
Quand la nuit arriva, j’étais assise dans un fauteuil, installée confortablement, mes avant-bras délicatement posés sur le balcon. A mes côtés, Faros, aussi fidèle qu’aux origines de notre rencontre, feuillerait un épais manuscrits, le bruit des pages accompagnant mes pensées.

Il doit vous attendre, Dame Memphis.

Je sais.

Contre attente, je laissai alors échapper un éclat de rire. Oh oui, il devait m’attendre… A l’heure qu’il était, il devait certainement se retrouver à la clairière, constatant que je n’y étais pas… Il patienterait un peu, sans doute une heure, puis reviendrait, enragé à l’idée de s’être déplacé pour rien, puis rentrerait se coucher, maudissant mon nom. Il n’avait pas fait que perdre son temps, oh oui, mon cher Argorath… Tu venais de perdre beaucoup plus…

La journée du lendemain fut pleine de banalité. L’air frais de Serkheim se faisant parfois surpasser par les courants chauds de l’été, la population se couvrait moins, dévoilant à tout va des gorges dénudées et des morceaux de peau nue qui mettaient au supplice les nocturnes les moins habiles.
Les préparatifs de la guerre allaient bon train… Les cohortes de chaque fomoire participant étaient organisées d’une main de fer et le seigneur de la guerre activait la garde noire avec brio. Les lycans se tenaient aux frontières et s’ils ne faisaient pas encore mine d’attaquer, nous savions que le danger était imminent. Ils étaient environ cinq cent, un chiffre que les nocturnes réprimeraient efficacement malgré le risque de pertes évident. Je faisais partie de la cohorte de Keralwin en tant que capitaine d’une section et je n’avais plus beaucoup de temps devant moi…
L’assaut fut décidé, il commencerait dans la soirée du lendemain. Les cohortes seraient déplacées au dernier moment avec l’efficacité martiale propre à Serkheim, et l’attaque serait foudroyante. Le commandement était laissé aux subalternes, à savoir Argorath et moi-même, et le seigneur Keralwin, sur le terrain, serait chargé d’exécuter lui-mêmes les têtes pensantes des chefs lycans qui se trouvaient en retrait. Selon des sources extérieures, leurs défenses seraient minimales et il s’agirait, pour un maître d’umbromancie, d’un jeu d’enfants…

Le jour J arrivant, je pris le commandement de la cohorte du seigneur Keralwin et souhaitai bonne chance à mon seigneur avant de le quitter, menant les soldats armés de longues lances d’argent en direction de la frontière ouest de Serkheim. Discrets, efficaces, nous nous immobilisâmes à quelques kilomètres afin de garder le secret de notre présence aux yeux des lycans et j’échangeai des messages par coursier durant les heures qui suivirent avec Argorath qui commandait l’autre troupe. Quand tout fut prêt, il ne manquait que le signal du seigneur Astérion, synonyme que le seigneur Keralwin avait réussi à dépasser les lignes de défenses lycanthropes sans se faire voir. La nuit tomba progressivement… Et quand les étoiles piquetèrent le ciel, l’alarme fut donnée.

Nous tombâmes sur nos ennemis comme une vague de glace, tuant impitoyablement ceux qui se dressaient devant nous, écrasant la vermine qu’ils étaient. Certains des miens tombèrent à mes côtés tandis que je me battais et si je défendais au mieux mes soldats, je savais qu’il y aurait des morts des deux côtés. Usant de l’umbromancie comme jamais, je fus synonyme de terreur parmi les changeurs de forme et le nombre de mes victimes fut impossible à deviner quand je dépassai l’énième tête tranchée… Le sang volait autour de moi, éclaboussant mon visage, tombant sur mes lèvres, attisant ma rage et mon euphorie. Des bruits de massacre s’élevaient sur le champ de bataille et il m’était presque possible d’entendre ceux du combat voisin, celui où la cohorte de Vlad dirigé par Argorath piétinait vies et futurs, effaçant toutes traces de passés lunaires… Dirigeant ma monture uniquement par les genoux, les ombres voletant autour de moi comme des vagues de ténèbres, l’acier de mes lames tranchaient les gorges, fendaient les gueules comme du bois tandis que des hurlements d’agonie faisaient vibrer mes oreilles. Suivie de près par Faros, à nous deux nous repoussâmes les lignes avancées des lycans, ouvrant une nouvelle voie aux soldats qui s’y engouffrèrent, les yeux sanglants plein de haine. Oui, les pions avaient tous fait un bond vers une case en avant… Et les pièces maitresses faisaient de même.
Le combat dura longtemps, une heure passa et il en restait encore. Etaient-ils plus que nous le pensions ? Néanmoins, la victoire était déjà acquise… Levant mon épée vers le ciel, poussant un cri de rage reprit par les troupes nocturnes, les derniers survivants ennemis tentaient alors de fuir tandis que d’autres, avec l’énergie du désespoir, essayaient vainement de nous repousser. M’immobilisant sur ma monture, le bruit d’une cavalcade attirant mon attention, je vis alors le seigneur Astérion foncer sur moi sur son knarg. S’arrêtant brusquement à mes côtés, attirant l’attention des soldats qui se trouvaient aux alentours, sa voix forte couvrit le bruit des lames et des griffes.

Le seigneur Keralwin est tombé dans un traquenard. Il est mort. Accompagne moi, Viladra, ses tueurs ne l’ont pas tous rejoint dans l’au-delà et tu es celle qui aura la plus grande rage à les détruire. Tous.

Comme si lycans et nocturnes s’étaient silencieusement donnés le mot, le bruit des affrontements cessa dans un rayon d’une dizaine de mètres autour de nous et alors que j’affichai une mine horrifiée, une grondement sourd d’une rage contenue ne tarda pas à grandir. Un seigneur fomoire était mort… Une tragédie. Puis lentement mais surement, le sens des mots du seigneur de la guerre fit son chemin dans les esprits. Un traquenard ? Quelqu’un avait donc trahi parmi les nôtres, prévenant les ennemis de la mission d’assassinat ? Qui avait pu faire une chose pareille…
D’un coup, les affrontements reprirent, plus acharnés que jamais, la colère, la tristesse et la fierté blessée augmentant nos forces. Laissant mes soldats à leur boucherie, je talonnai ma monture, précédant Astérion, fusant vers le nord.
Traversant les combats de la cohorte du seigneur Vlad, j’aperçus brièvement Argorath sur son cheval qui se tourna vers moi, surpris, mais je ne pris pas la peine de savourer mon triomphe…
Traversant les campements des lycans, je ne tardai pas à voir une dizaine de lycans jaillirent d’un abri, se ruant sur nous, leur taille démesurée me confirmant leur rôle de dirigeant. Tendant un bras en avant, les deux premiers s’embrochèrent sur des pics d’ombre tandis que je sautai de ma monture, me recevant dans une roulade. Dégainant mes deux lames, j’accueillis deux autres avec la vivacité d’une flamme, tranchant une gorge et esquivant des griffes avant de transpercer le dernier, ramenant mon arme dans mon dos d’un geste fulgurant. Du coin de l’œil, je vis des nocturnes accourir dans notre direction afin de nous porter leur aide.

« Enfin… Enfin… »

Avec l’aide du seigneur Astérion, vaincre les autres fut aussi rapide qu’aisé et le silence retomba. Les combats au loin semblaient s’être terminés car aucun bruit ne troublait l’espace. Lentement, je me baissai alors et faisant rouler un cadavre de loup sur le côté, je dégageai le corps de Keralwin. Sa gorge avait été lacérée par les griffes d’un lycan et plus aucun sang ne coulait désormais, son corps s’en étant vidé. Des cris de rages s’élevèrent, j’entendis des femmes soldats réprimer des sanglots et tous posèrent un genou à terre derrière moi tandis qu’Astérion posait son poing sur son torse, baissant la tête en signe de respect. Mes mains caressant lentement le visage du défunt, je laissai alors échapper un sanglot et baissai la tête sur la poitrine de mon ancien maître, avant de l’enserrer dans mes bras. Sentant Faros poser une main sur mon épaule tandis qu’il murmurait des paroles réconfortantes, Vlad et Argorath ne tardèrent pas à nous rejoindre et je sentis leur surprise sans même avoir besoin de les voir.

Dame Memphis… Relevez-vous.

Astérion s’était penché sur moi et après quelques secondes d’hésitation, j’essuyai mon visage d’un geste rageur et me remis sur pieds, chancelante. Les soldats présents s’inclinant face à moi en signe de condoléance, je baissai la tête et enfouis mon visage entre mes mains.
Avec l’efficacité qui était la sienne, notre commandant reprit rapidement les choses en main et j’entendis sa voix grave lancer les premiers ordres.

Vous… Prenez son corps et ramenez-le à la citadelle. Les autres, brulez les corps et veillez à ce qu’il n’y ait aucun risque d’épidémie. Seigneur Vlad, formez une troupe pour rapatrier les blessés et ordonnez des soins au plus vite.

Les ordres s’enchainaient, les uns après les autres, et je ne bougeai pas, mon visage toujours à l’abri derrière mes doigts. Raccompagnée à ma monture par Faros et le seigneur Astérion, un couloir respectueux se créant parmi les troupes, je me hissai difficilement en selle et le regard toujours baissé vers le sol, nous quittâmes ces lieux morbides pour regagner la capitale.

Quand nous fûmes seuls dans l’un des salons privés du seigneur Astérion, je redressai alors mon visage vers lui et il m’adressa un mince sourire.

J’espère que cette perte ne te causera pas trop de chagrin, Viladra…

Laissant échapper un mince rire, les yeux exempts de larmes, je posais un regard jubilant sur celui qui fut le premier et le seul maître que je connus. Faros se joignit à notre allégresse et nous savourâmes silencieusement notre victoire. Le fou avait été éjecté de la partie… Il n’en restait plus qu’un, désormais.

Deux jours plus tard… Sur la place principale de la capitale d’Akkaron, une grande estrade avait été dressée afin que chacun voie les personnalités qui s’y trouvaient. En son centre, le seigneur Astérion. A ses côtés, les huit fomoires se trouvant à Serkheim ainsi que leurs bras droit, et juste à sa gauche, je me tenais, droite et fière malgré un air de deuil sur son visage. Non loin de Vlad, Argorath fixait la foule d’un air ennuyé même si je savais qu’il jubilait intérieurement… Car une place de Fomoire venait de se libérer et il était le premier pressenti pour le remplacer. Juste à la droite d’Astérion, royal, respecté et craint, le prieur Gwidonn imposait le silence par sa simple présence. Quand la foule qui nous faisait face cessa de bouger, que les plus hautes personnalités installées à l’avant se turent, le dirigeant de la garde noire prit la parole.

Peuple de Serkheim ! Commença-t-il d’une voix forte. Il y a deux jours, une terrible tragédie nous affligea tous lors de notre confrontation face aux lycans. Le seigneur Keralwin, paix à son âme, un fomoire vénérable, volontaire, sage aussi, tomba dans un piège et fut abominablement tué alors qu’il se battait pour notre royaume au nom de chacun d’entre nous !

Des éclats de rage saluèrent ses paroles, des poings se levèrent en signe de colère et des femmes couvrirent leur visage pour pleurer discrètement dans leur tissu. Quand le silence revint, Astérion prit le temps de balayer la foule de son regard de glace et reprit un peu plus bas, d’une voix froide laissant suinter la haine et la rancœur. Quel talent… Il était si bon orateur, il pouvait faire croire à un nocturne que le soleil était bon pour lui, si l’envie lui prenait…

Il m’est difficile de l’admettre, cette simple vérité me débecte et fait frémir les plus loyaux d’entre nous… Hélas, peuple de Serkheim, malgré les nombreuses hypothèses qui me taraudèrent jour et nuit… Je suis forcé de vous l’avouer, il y a un traitre parmi nous !

Un nouveau mouvement de colère parcourut la masse grouillante à mes pieds et je restai concentrée, affichant toujours ce même air de tristesse retenue.

De notre plan, quatorze d’entre nous étaient au courant. Reprit-il après une courte pause. Parmi eux, en dehors de moi-même, le seigneur Keralwin et nos éminents prieurs…

Il se tourna pour s’incliner face à Gwidonn qui répondit d’un hochement de tête austère.

… quatre fomoires et leur bras-droit était au courant. J’ai cherché, mes frères, j’ai cherché longtemps afin de savoir qui, dans ce court laps de temps, osa rallier les forces ennemis afin de commettre l’abjecte meurtre du seigneur Keralwin… Qui, durant une courte nuit et une unique journée, prit la peine de nous faire faux bond afin de commettre le crime qui s’abattit sur nous la nuit dernière.

Sentant ses futures paroles arriver, je fermai les yeux, méprenant le public d’une tristesse infinie tandis que je savourais ma victoire. Oui… Poursuivez donc, seigneur Astérion, accordez moi ce plaisir au-delà de la jouissance, faites de moi une femme vengée…
Se tournant alors vers Argorath, le seigneur Astérion leva lentement son bras et pointa un doigt sur sa poitrine. Je vis la stupeur dans les yeux du vicaire, je vis sa bouche s’ouvrir plusieurs fois tandis qu’il cherchait à comprendre… Puis il vit mon regard posé sur lui… et de la surprise, il passa au désespoir quand il comprit alors ce qui lui arrivait.

Seigneur Argorath, annonça alors Astérion d’une voix forte, vous êtes accusé de crime contre un dirigeant de Serkheim. De nous tous, vous êtes le seul à vous être absenté suffisamment de temps la nuit qui suivit la décision du plan de bataille…

Les hurlements de rage m’enveloppèrent dans une étreinte tiède. Les cris enragés et effrayés d’Argorath résonnèrent comme un chant mélodieux à mes oreilles et je l’entendis prononcer mon nom, tentant de faire croire à tous que moi, Viladra, la plus fidèle de Keralwin, je l’avais piégé. Fermant les yeux, parfois bousculée par les soldats qui se précipitaient sur l’estrade pour saisir l’accusé, une vague de bien-être m’envahit alors. Oui… Tu as perdu, Argorath… Et je délecterai ma victoire dans ton sang.





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Ven 8 Fév - 19:24




Conclusion.



"Quand parfois sur ce globe, en sa langueur oisive,
Elle laisse filer une larme furtive,
Un poète pieux, ennemi du sommeil,

Dans le creux de sa main prend cette larme pâle,
Aux reflets irisés comme un fragment d'opale,
Et la met dans son coeur loin des yeux du soleil."


Le tombeau, confident de mon rêve infini. [FB - 50 ans / solo]  132960430919mSanstitre

Tout le gratin de Serkheim était présent. Installés en arc de cercle dans la vaste pièce de jugement, les nobles murmuraient entre eux, le brouhaha léger couvrant à peine l’arrivée des gardes encadrant une silhouette affaissée.
Confortablement assise en face de l’espace prévue pour l’accusé, Astérion se tenait à mes côtés, les autres fomoires placés juste derrière nous. Sur une estrade, encadré de deux membres de la garde noire, le juge Erenduil venait de s’asseoir, sa venue faisant taire les murmures. Argorath, plus affaibli que jamais, tentait en vain de se tenir droit derrière sa balustrade, ses yeux fixant le vide, les traces de sang maculant un visage autrefois magnifique. Je ne sus s’il me remarqua à ce moment-là, mais je me concentrai avec attention afin de ne laisser transparaître aucun sourire tandis que les derniers représentants de la justice s’installaient. Le prieur Gwidonn présent à la scène, assis dans un confortable fauteuil dans l’une des loges principales, balayait la foule de son regard, installant un silence parfait.

Nous pouvons donc commencer.

Le juge venait de donner le rythme… Il déplia lentement ses feuillets, les étala devant lui sans se presser et joignit le bout de ses doigts avant de relever la tête pour observer l’accusé.

Argorath Men’ Velith. Vous comparaissez aujourd’hui pour répondre de vos actes. Vous êtes accusé de complots et de meurtre envers un dirigeant de Serkheim. Après vérification des preuves et écoute des divers témoignages, il en a été décidé que vous seriez jugé coupable. Avez-vous quelque chose à redire à cela ?

« Savoure donc, Viladra…
Plus que jamais. »

Je le vis redresser la tête, ouvrir la bouche plusieurs fois avant de la refermer et de fixer à nouveau le sol. Il avait passé plusieurs mois dans les prisons de Serkheim et autant dire que même pour une créature de l’ombre, ce n’était pas la joie… Il était affaibli, blessé, sans doute malade. Sa fin était proche et il la sentait aussi surement que je voyais arriver ma place de fomoire.
Lentement, son visage se tourna vers moi, survola mes voisins avant de se poser sur ma personne. Tout le monde suivit son regard et j’affichai une mine haineuse qui m’apporta la sollicitude des nocturnes à mes côtés. Il me fixa longtemps, si longtemps que je sentis même le malaise me gagner… Car dans ses yeux, j’y voyais l’incompréhension et une tristesse infinie. Comment pouvait-il se montrer étonné, lui pour qui j’avais éprouvé la plus grande colère… ? C’en était pitoyable…
Il fut rappelé à l’ordre par le juge et ce lien visuel se brisa.

Conformément aux lois de Serkheim, vous êtes condamné à mort. Et comme votre acte fut d’une barbarie sans nom, il a été décidé que la main de votre exécuteur sera celle du plus proche du seigneur Keralwin. Paix à son âme.

Il fut amené au centre de l’espace dallé, forgé de s’agenouiller et lentement, je me levai, glissant le long de l’allée avant de m’immobiliser devant lui. Il me fut amené un coutela en argent, finement gravé dont la lame brillait de mille feux. J’entendis à peine le maître de ce rassemblement me parler, tout ce que je sus, au milieu de ces centaines de regards braqués sur moi, dans un silence lourd de reproches silencieux, c’est que je m’apprêtais dès lors à tourner définitivement une page de mon passé.
Me baissant lentement, mon visage à quelques centimètres de celui qui fut une véritable souffrance, pour moi, je vis ses yeux se poser dans les miens, l’affliction se peignant sur ses traits. Alors, avançant mes lèvres jusqu’à son oreille, son odeur si reconnaissable encore repérable sous celle de la sueur et du sang, mes mots découlèrent en lui comme un poison dévorant.

Tu as perdu, Argorath. Tu as perdu parce que tu étais trop faible.

Ma lame s’enfonça dans son abdomen, remonta d’un geste irresistible jusqu’à ses côtes avant de tranche son cœur à deux, laissant répandre ses tripes et son sang au sol. Il n’émit qu’un simple hoquet de douleur puis dans une dernière convulsion, son regard toujours dans le mien, je vis l’étincelle de vie le quitter et il bascula lentement sur le côté. Echec et mat.

La vie reprit son cours rapidement, les fomoires me contactèrent quelques mois plus tard et je me retrouvai face aux trois prieurs. Il fut décidé qu’en raison de mon statut proche de Keralwin et ma puissance nouvellement remarquée, j’étais celle qui prendrait sa place, me taillant une nouvelle vie parmi les fomoires. Ho… J’y gagnai beaucoup. Non seulement j’héritais des anciennes responsabilités du défunt, à savoir le contrôle de l’économie de Serkheim, mais ma richesse était immense tandis que mon prestige ne cessait de croître. Oui… Mes contacts se firent plus nombreux et ma puissance grimpa en flèche sous l’ombre discrète et protectrice du seigneur Astérion.

Cette histoire semble remonter à si loin, pour moi… Et pourtant, je m’en rappelle comme si elle datait d’hier. Cette faiblesse qui m’habitait, jadis… Ces incertitudes… C’était assez amusant de voir les changements qu’il y avait eu jusqu’ici. Ho… Vingt années me séparaient de ces derniers évènements, mais il me semblait presque avoir pris des siècles depuis…




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